Elle n'en pense pas un mot

(The Franchise Affair)

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  • 7/10 Etrange histoire, que celle de la jeune Elizabeth Kane, seulement âgée de quinze ans. Elle affirme avoir été enlevée et retenue prisonnière par deux femmes, Marion Sharpe et sa mère, dans leur maison, afin de l’obliger à devenir leur domestique. La gamine porte encore sur elle de nombreuses traces de coups et sait sans mal décrire de multiples lieux de la demeure. Cependant, les deux Sharpe nient catégoriquement. Qui croire ? Les accusées recrutent Robert Blair, avocat peu spécialisé dans le domaine du droit criminel, tandis que l’inspecteur Grant doit démêler cette sombre intrigue. Mais Elizabeth est-elle aussi crédible et innocente qu’il n’y paraît ?

    Extrait de la série consacrée à Alan Grant, ce roman est inspiré d’un fait réel, l’affaire Elizabeth Canning. Sur un rythme sage, très policé et finalement so british, le lecteur se prend de passion pour ce mystère autant policier que judiciaire. Les personnages, dépeints rapidement et placés sur la scène de cette originale histoire, sont crédibles et convaincants. Joséphine Tey use d’une langue délicieusement surannée (on ne s’en étonnera que peu, l’ouvrage datant de 1958), ce qui contribue au charme si particulier du roman. Entre recherche des failles dans les déclarations d’Elizabeth, dite Bethy et les légitimes suspicions émises à l’encontre de la famille Sharpe, si froide et volontairement recluse dans leur maison en cours de délabrement et appelée The Franchise, les doutes et le suspense afférent se multiplient. Cependant, on regrette un traitement de l’énigme un peu trop partial, puisque l’on se doute très vite qu’Elizabeth n’est pas le chérubin qu’elle veut bien paraître, de même que deux événements – des témoignages – viennent trop vite affaiblir ses dires. Cependant, la grande force de ce roman succinct tient également dans la peinture acide des acteurs secondaires de ce prétendu drame. Les autorités religieuses, promptes à condamner sans connaître le moins du monde le dossier et ainsi vouer aux gémonies les Sharpe. Les médias toujours aussi véloces quand il s’agit de dégainer un jugement à l’emporte-pièce et nourrir ce que l’on n’appelait pas encore à l’époque un buzz. Les simples citoyens de Milford, prêts à s’en prendre aux prétendues coupables, sans la moindre considération pour la notion de présomption d’innocence, allant jusqu’à attaquer The Franchise, comme on aurait anciennement lynché des suspects au seul motif que la jeunesse ne saurait mentir et que la vindicte populaire ne peut qu’avoir raison dès lors que le stupide grégarisme unit dans un troupeau de viandes pensantes des individus si pieusement intentionnés.

    A défaut de livrer un roman policier totalement convaincant, Joséphine Tey croque avec justesse – et donc au vitriol – les si belles mœurs de ses contemporains. Un portrait très fin, sans jamais être caricatural, de la vitesse avec laquelle les poncifs peuvent déclencher des violences pouvant tourner à la tragédie, sans les moindres égards dus à la modération, le libre-arbitre et, finalement, à l’intelligence humaine. Et, en cela, il est tout à fait compréhensible qu’en faisant écho à une célèbre affaire criminelle, ce livre ait pu recevoir autant d’honneurs littéraires.

    30/11/2016 à 18:45 El Marco (3434 votes, 7.2/10 de moyenne) 2

  • 7/10 ce roman a un peut vieilli mais garde tout son charme , josephine tey , influence nombre d auteures de nos jours.

    03/09/2013 à 17:58 latimer (705 votes, 6.9/10 de moyenne)