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8/10 Saint-Romain, petite bourgade du Périgord. Une équipe d’hommes y œuvre comme pompiers. Unis dans les malheurs répétitifs comme dans les joies simples. Des interventions vers des accidents de la route, des désœuvrés en quête d’aide, et souvent le sang ou des cadavres brûlés au point de rendez-vous. Mais il arrive que certains secours sortent de l’ordinaire, comme à La Chabroussie, où l’on retrouve des suicidés avec un couteau de boucher planté dans le cœur. Y aurait-il des secrets dissimulés dans ces paisibles campagnes ?
Auteur du remarquable Passe-temps pour âmes ignobles ou de Victime delta qui décrit également l’univers des pompiers, Louis Sanders sait sans mal dépeindre le Périgord qui est d’ailleurs la toile de fond de l’ensemble de sa bibliographie. En quelques traits de plume, avec une grande économie de moyens, l’écrivain rend immédiats des lieux, ambiances et individus. Ce qui est remarquable, c’est justement sa manière de croquer les personnages : humains, avec autant de zones d’ombre que de clarté. Aucun d’entre eux n’est un héros ni un modèle : ce sont pour la plupart des êtres ordinaires, ensevelis dans ce terroir abandonné, qui vivotent plus qu’ils ne vivent réellement. Leur routine s’étire de drames violents en assistances portées à des personnes isolées ayant oublié leurs repères. Les pompiers ainsi décrits avec justesse, dans leurs opérations comme dans leur quotidien, cherchent la femme idéale, se perdent pendant des heures pour savoir comment organiser leur bal rituel, révisent pour d’hypothétiques concours, boivent avec excès.
Par-delà ces portraits cinglants de crédibilité, il y a l’intrigue policière, tel un fil rouge, ou les questionnements d’un de ces serviteurs de la sécurité publique qui tente de comprendre les raisons de ces cadavres dont on semble avoir maquillé les causes réelles du décès, ou encore le pourquoi de la disparition des carnets de l’ancienne institutrice. Lentement, pièce par pièce, la vérité se fera jour dans les ultimes pages du roman. Louis Sanders a choisi la noirceur, et la lumière se fait alors sur de sombres alliances, aussi fétides que plausibles.
La lecture du feu constitue donc, une fois de plus, une ample réussite littéraire de Louis Sanders. Amer, vitriolé, le livre s’achève comme il a commencé : avec plus de douleurs que de réels espoirs. Et le lecteur referme cet opus en repensant au titre de l’ouvrage. Pour faire bref, la lecture du feu consiste à évaluer les risques de l’incendie couvant derrière une porte : couleur des flammes, densité des fumées, température perceptible, etc. Il en va des drames comme des combustions : nul ne sait ce que l’on va découvrir lorsque l’on ouvrira l’accès permettant de les atteindre.15/05/2012 à 09:34 El Marco (3455 votes, 7.2/10 de moyenne)