Fantômes : Histoires Troubles

(20th Century Ghosts)

  1. Parcelles blanches et noires

    Dans le grand catalogue des dictons, nous n’avons que l’embarras du choix. Certains se montrent même contradictoires : ne dit-on pas tout autant « Tel père, tel fils » que « Le fruit est tombé bien loin de l’arbre » ? Aussi, lorsqu’il s’agit d’entamer la lecture d’un livre signé par Joe Hill, qui n’est autre que le rejeton du grandissime Stephen King, il y a de quoi se poser de légitimes questions. A-t-il un talent proche de celui de son géniteur ? Ou ne bénéficie-t-il que d’une estime critique en raison de sa prestigieuse ascendance ? En lisant les quinze nouvelles de ce recueil, indubitablement, on peut se demander si le génie n’est pas congénital. Comme dans de nombreux spicilèges, les genres sont nombreux et variés. On a le plaisir de découvrir de la littérature blanche, comme « Mieux qu’à la maison », d’où émergent avec beaucoup de tact et d’humanité de justes observations quant aux relations familiales. D’autres portent nettement le sceau du fantastique et de l’étrange, comme « La Belle au ciné hantant », ou comment le spectre d’une femme va durablement marquer un homme comme un lieu. Il y a également des frissons, comme dans « Dernier cri », classique mais efficace, ou encore « Le Téléphone noir ». De jolis moments de frousse, où le suspense côtoie l’irrationnel, avec une belle économie de mots mais jamais d’émotions. « Stridulations » et « La Cape » mêlent le fantastique à l’humour, pour un plaisir total. Et c’est dans ce qui aurait pu tourner au grand n’importe quoi que Joe Hill prouve qu’il n’est pas n’importe qui : comment une histoire d’amitié entre un gamin et un personnage gonflable (sic) parvient-elle à nous surprendre, mais aussi nous secouer et nous émouvoir ? Et que dire de la dernière nouvelle, « Escamotage », qui croise avec un tel brio suspense, fantastique et émoi, autour de ce frère si perturbé qui crée de bien énigmatiques labyrinthes avec des cartons enchevêtrés ?

    Un magnifique panachage d’histoires, où l’on croise Abraham Van Helsing, Robin Williams, ou encore George Romero. De l’ironie, de la malice, de la tendresse, de l’émotion, sans oublier les nécessaires frémissements. Autant de récits brillants pour autant de talents mêlés sur la palette de Joe Hill, dont on attend avec impatience d’autres œuvres !

    /5