La Forêt des silences

1 vote

  • 7/10 La jeune Naomi, documentaliste (elle est rémunérée pour dénicher des informations pour des écrivains, leur fournissant les informations nécessaires à leurs futurs ouvrages) est mandatée pour se rendre à Hag’s, un patelin où un auteur, Barney Lambster, a mystérieusement disparu. Il faut dire que ce village véhicule d’étranges histoires : un juge, Hooter, qui se plaisait à lyncher des condamnés, des rumeurs de sorcières, des « bucherons » qui continueraient de vivre dans les bois environnants, une communauté vivant recluse, avec des mœurs prudes et policées, une forêt saturée d’une flore toxique… Mais Naomi n’est pas au bout de ses surprises.
    Que l’on soit clair : Serge Brussolo, j’adore. Je guette toujours les sorties de ses romans en piaffant comme un gamin et, même s’il m’a parfois un peu déçu, je demeure addict à son univers, son imagination, sa prose et également à sa prolixité. Ici, on est dans du classique (pour du Brussolo, s’entend) : une ambiance anxiogène, des personnages nombreux et bien barrés, une relecture du folklore et de la culture américaine, des histoires à tiroirs (dans un seul chapitre, il y a parfois matière à plusieurs autres livres), des faux-semblants et autres manipulations, et toujours cette dose de WTF que seul cet auteur pratique avec délectation et tant de second degré assumé. Le début est toujours aussi fort et surprenant, le deuxième tiers est fort, riche en moments prenants, puis vient le dernier tiers où, malheureusement, Serge Brussolo se laisse aller à une volubilité que je lui reproche (bien modestement) assez souvent : trop d’idées, trop d’action, et, pour celles et ceux découvrant l’œuvre de l’auteur avec cet opus, la très probable impression qu’il a subitement plongé le nez dans des substances illicites. Certes, ça devient un peu n’importe quoi sur les trente dernières pages, mais je reste un fan absolu de sa bibliographie, de son style et de sa façon si particulière de détricoter l’univers si typiquement américain pour le retricoter à sa sauce. Du pur page-turner hollywoodien, mais l’inventivité et l’âme en plus.

    08/06/2024 à 07:42 El Marco (3422 votes, 7.2/10 de moyenne) 3