Cantique des ténèbres

  1. Opération Dracula

    Dans un futur proche, Paris est devenue un lieu où s'est reformée la Cour des Miracles, comme dans la plupart des autres grandes villes européennes. On y trouve pauvres et malfrats, unis pour tenter de survivre à la loi imposée par un Ministre de l'Intérieur aux méthodes dictatoriales. La jeune Nito Crisgolenko est conservatrice au Louvre et, par le plus grand des hasards, vient à pénétrer dans ce cercle d'infortunés. Elle croisera nombre de personnages étranges avant l'hécatombe déclenchée par un pouvoir politique lassé par tant de laisser-aller.

    Avec Cantique des ténèbres, Édouard Bernadac signe un thriller particulièrement original et saisissant. Avec à peine plus de deux-cents pages, le récit est court, haletant, alternant les scènes d'action et les descriptions de cette fameuse Cour des Miracles. La langue de l'auteur est très agréable, parfois poétique, nourrie de mysticisme, servant avec bonheur une histoire loin des canons de la littérature noire habituelle. En effet, non content de narrer un avenir proche, Édouard Bernadac peint une galerie de protagonistes excentriques : un cabaliste ayant réussi à créer un golem, un Ministre de l'Intérieur prêt à pactiser avec le Diable – au sens littéral du terme -, des ombres démoniaques, un informaticien paré à se lancer dans le monde virtuel qu'il a créé... Le lecteur se trouve dans un univers complètement décalé et ésotérique. Si l'on perd parfois le fil de l'intrigue principale, il faut reconnaître à Édouard Bernadac un indéniable talent de conteur et une imagination débordante, rappelant certaines frénésies de Serge Brussolo ou du Club Van Helsing.

    Cantique des ténèbres est donc un thriller fantastique qui ne ressemble à aucun autre, enlevé et troublant. Au-delà de l'aspect récréatif de l'histoire, cette dernière prend une nette ampleur politique, avec cette vision des indigents chassés de la cité par un pouvoir gouvernant prêt à toutes les alliances pour se débarrasser d'eux. Évidemment, il ne s'agit ici que de pure fiction : toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé ne serait que pure coïncidence. Encore que...

    /5