Le Choc de Carnac

  1. Qui a tué Le Géant ?

    4700 ans avant notre ère. Le Géant, un commerçant habitué aux grands périples est assassiné par des flèches. Autres éléments troublants : les objets qu’il possédait ont été dérobés, et son crâne, ouvert, laisse penser que l’on a mangé son cerveau. Dans le même temps, les Cultivateurs veulent étendre leur village, voire développer une colonie, sans pour autant entrer en guerre avec les Pêcheurs de la côte ou les Nomades de la Forêt-des-Buttes. Afin de comprendre ce qui s’est passé, trois femmes, émanant chacune de l’une de ces ethnies, vont mener l’enquête, avec à leur tête La Vivace, une Cultivatrice particulièrement sagace et courageuse.

    Sophie Marvaud s’est fait une spécialité d’emporter son lecteur dans des époques lointaines : l’Antiquité (Adieu Pompéi), la Première Guerre mondiale (Suzie la rebelle dans la Grande guerre), ou la Préhistoire (Meurtre chez les Magdaléniens), et c’est justement à cette époque – plus exactement le Néolithique – qu’elle nous invite pour ce Choc de Carnac. L’ouvrage, très réussi, mêle les éléments du classique whodunit à l’aventure, en passant par une description délicieuse et fort instructive de cette époque, assez peu exploitée dans la littérature policière. L’histoire est très intéressante, ménageant de nombreuses fausses pistes, et ça n’est que dans les ultimes pages que l’on obtiendra la résolution de l’énigme, crédible et marquante, qui se paie en outre le luxe d’être, au choix, intemporelle ou d’une incroyable modernité. Qui a bien pu s’en prendre à ce colosse qui revenait au village à intervalles réguliers, toujours prompt à narrer les expériences de ses voyages, et assez pacifique ? Secrets de famille, chamanisme, luttes pour le pouvoir, négociations politiques et trahisons, cannibalisme, de multiples ingrédients viennent alimenter un récit très bien bâti et intelligent, même si l’on peut, de temps en temps, regretter que la langue de Sophie Marvaud se montre un peu trop simple. Parallèlement, cette reproduction de la société préhistorique tient amplement la route, et la bibliographie présentée à la fin de l’ouvrage est consistante et n’a pu qu’aider l’écrivaine à construire un panorama historiquement valable. Quel régal que de se cultiver aux côtés de La Vivace, petit bout de femme sec et hardi !

    Un roman à la fois distractif, didactique et atypique, et qui ne cède à aucune mode littéraire. Une véritable gageure doublée d’une réussite indéniable.

    /5