La Taupe rouge

Dix-sept flashes sur le printemps

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  • 9/10 Février 1945. Le IIIe Reich est à l’agonie. Face à la pression militaire, certains nazis tentent de sauver ce qui peut encore l’être, pour des raisons personnelles ou pour la patrie moribonde. Maxime Issaïev, alias Max von Stierlitz, est un agent secret soviétique, qui va tenter de déjouer ces complots et offrir à l’URSS, bannie de ces discussions, un rôle plus important.

    Les Occidentaux ne connaissent guère l’œuvre de Julian Semenov, auteur pourtant célébrissime de l’autre côté de l’Oural, dont l’œuvre a été transposée à la télévision et au cinéma, et à qui un musée est consacré en Crimée. D’ailleurs, la préface de Zakhar Prilepine, écrivain et homme politique, se révèle nécessaire pour comprendre l’homme que fut l’écrivain, quel aura été son parcours et sa philosophie. On assiste sans le moindre temps mort à ce qui s’est déroulé entre le 12 février et le 18 mars 1945 dans l’Allemagne en pleine déchéance, certaines élites cherchant à négocier une paix forcée avec les Anglais et les Américains pendant qu’il en était encore temps. On découvre également le personnage de Max von Stierlitz, officiellement « SS-Standartenführer, […] membre du NSDAP depuis 1933 […] implacable avec les ennemis du Reich », qui est en réalité un espion de l’URSS, et qui va utiliser le pasteur Schlag, entre autres, pour épier ces pourparlers et tout mettre en œuvre pour les stopper. C’est un individu flegmatique, assez philosophe et plutôt placide en apparence, ce qui ne l’empêche nullement d’être très rusé, perspicace et manipulateur, sans compter sa détermination sans faille : la première opération à laquelle il se livre dans le roman, avec une exécution à la clef, fixe d’emblée ce dont il est capable. Au-delà de l’intrigue, c’est aussi une remarquable radioscopie de la dictature nazie en pleine déliquescence qui nous est offerte, avec ses complots, ses coups bas, ses manœuvres et ses pressions, où chaque rat essaie de trouver sa planche de survie. Adolf Hitler, Hermann Göring, Heinrich Himmler, Joseph Goebbels, Reinhard Heydrich, mais également Winston Churchill et Joseph Staline : tous ces personnages interviennent dans le livre, en chair et en os, ou à travers des enregistrements ou transcriptions de leurs échanges. La fiction se marie à la perfection à la réalité, dans cet ouvrage de premier plan où l’on ne fait qu’entrapercevoir la solide connaissance par Julian Semenov des appareils politiques et d’espionnages des diverses nations concernées.

    Que les amateurs des OSS 117 et adaptations cinématographiques de James Bond passent leur chemin. L’écrivain Julian Semenov nous propose un roman fameux, d’une immense érudition et pourtant accessible, sur la chute des Aigles du Reich et, de manière générale, sur les petits arrangements auxquels se livrent les rapaces quand ils se sentent proches du rang de proies.

    25/01/2021 à 07:07 El Marco (3422 votes, 7.2/10 de moyenne) 4