Le petit train de la brousse

Je le reconnais, j'ai rarement pris autant de plaisir qu'à lire ce livre sur l'Afrique noire.
Baleine se balade, dans son petit train de brousse ou dans des autobus fourre-tout, conduit par quelque fier Africain trompe-la-mort. C'est dans cet incroyable méli-mélo livré de surplus au Club Méditerranée, aux charters, aux multinationales éperdument exploitantes, aux agents des grandes puissances, aux Mercedes des ministres, c'est dans ce pot-pourri que Baleine plonge avec une sobre ivresse.
L'Afrique de ce livre est dérangeante pour les bons esprits. Très naturellement, on est baigné dans le fétichisme, la magie, les envoûtements, les poisons, les masques, le cannibalisme, les mutilations, l'excision des femmes, la sauvagerie - sans que rien soit dénoncé. Au contraire, on est emporté par la gaieté, la bonhomie, la séduction du peuple noir.
Baleine aime l'Afrique, et même profondément, mais il la déguste comme elle est, et il ne lui en trouve que plus de goût. Il y a là à la fois le retour aux sources profondes de l'âme noire et les greffes de l'Occident, imprévisiblement accommodées ou dégénérées. Avec Baleine, on est simultanément dans la loufoquerie, la clownerie et la terreur. Son Afrique est sombre, mystérieuse, atroce, bon enfant, meurtrière, mensongère, sans sentiments humains, fraternelle. La nature écrase les hommes et les déforme. Tabous sinistres et éclats de rire, logique et imprévisibilité, puérilité et calculs naïvement méchants.

Non polar

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Soumis le 07/03/2020 par El Marco

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