Duo fatal

  1. La disparition de Geneviève

    Geneviève est l’assistante du dentiste Francis Lesigne, à Lambersart. Parce qu’elle compte déménager à Grasse et suivre son nouvel amoureux, rencontré sur Internet, la cinquantenaire apprend au docteur qu’elle doit le quitter. Francis ne parvient pas à l’admettre, au point de droguer cette femme et l’enfermer dans l’abri antiatomique aménagé dans la maison. Le début d’une étrange relation…

    Après Potions amères et Passé double, voici le troisième roman de Patrick S. Vast aux éditions du Chat Moiré qu’il a fondées. De ses autres romans, tous réussis, comme La Veuve de Béthune, Boulogne stress ou Angoisse à louer, on a conservé de bien bons souvenirs de l’écriture de l’auteur et de sa manière si particulière de bâtir des intrigues ; ce roman ne déroge pas à la règle. Une écriture sèche et simple, sans finasserie ni effet futile, l’histoire s’impose rapidement et sans la moindre anicroche. Tout y est efficace, crédible, presque palpable : tout s’y déroule comme dans un fait divers, plausible et tragiquement humain. Les personnages sont également à l’avenant. Francis, déboussolé par le départ de son assistante après trente ans de collaboration qui, sans toutefois parler d’amour au sens premier, a graduellement tissé entre eux une liaison très particulière. Geneviève, dépassée par les événements, séquestrée, mais qui va finir par nourrir des sentiments contradictoires pour cet homme qui, finalement, ne lui veut que du bien. Norbert, le compagnon de l’assistante, qui va connaître un large spectre de sentiments au gré du récit. Georges, l’ancien commissaire de police, alcoolique, dont l’épouse va très mal, et qui est obsédé par un tueur en série encore en fuite ayant assassiné cinq femmes. Géo, un saxophoniste aveugle, témoin à sa façon, et qui nourrit un profond attachement pour sa chatte (un clin d’œil au nom de la maison d’édition ?). Deux camarades de Francis, suffisamment pugnaces pour mettre de côté leur amitié pour le docteur et se poser de légitimes questions quant à la disparition de Geneviève. Et une fois le décor, la situation et les protagonistes posés, tout décolle très rapidement : des chapitres qui s’enchaînent à merveille, de nombreux rebondissements, des twists fameux, et un final en plusieurs étapes, comme une rafale d’arme automatique. Un régal de bout en bout. A la lecture du résumé, on aurait pu s’attendre à une énième histoire de captivité, avec son lot de sévices, d’horreurs et d’événements sombres. Mais Patrick S. Vast a bien trop de tact et d’expérience pour tomber dans les clichés : celui qui débute son ouvrage avec une dédicace à William Irish exploite des ressorts humains parfaitement adaptés, élémentaires et pourtant lumineux.

    Une nouvelle réussite pour cet auteur qui ne cesse de nous réjouir, notamment avec ce grand roman où il n’est finalement question que d’amour et d’amitié, avec des lectures inattendues de ces deux sentiments. C’en est même à se demander s’il ne s’agit pas là du meilleur roman de Patrick S. Vast.

    /5