Tous les péchés sont capitaux

(Призрак Небесного Иерус&)

  1. Sur la piste du Tourmenteur

    Moscou. Un cadavre repêché, avec le nombre 14 sur le crâne, et qui serait resté plusieurs mois dans un congélateur. La jeune Macha Karavaï, étudiante en droit, bénéficie d’un stage auprès du policier Andreï Yakovlev, et tous deux vont enquêter sur ce crime étrange et faire remonter à la surface d’autres homicides plus anciens, jusqu’à marcher dans les pas d’un tueur en série que l’on surnomme « Le Tourmenteur ».

    Ce premier roman de Daria Desombre séduit rapidement. Le cadre de la capitale russe est joliment décrit, et c’est avec plaisir que l’on plonge dans le dédale de ses rues, de son histoire et de ses us et coutumes. Les personnages sont vraiment réussis. Macha, fougueuse, « attirée par la connaissance comme un tournesol par le soleil » comme le disait son défunt père, obsédée par les tueurs en série, et qui va d’ailleurs bigrement se rapprocher du prédateur à l’œuvre dans ce roman, à moins que ça ne soit l’inverse. Andreï, qui vit une relation bouffonne avec son chien Marilyn, d’abord agacé de devoir faire équipe avec Macha avant de plier devant son savoir… et sa beauté. Innokenti, ami de la jeune femme et antiquaire de son état, qui va se révéler déterminant dans cette traque au monstre. Dès l’entame, le rythme est haletant, les informations se bousculent, et les chapitres, très courts, peinent presque à contenir tant de rebondissements. Cet opus s’intéresse à certains pans de la religion orthodoxe, et notamment ceux que l’on appelle les « vieux croyants ». On retrouve de nombreuses références littéraires et cinématographiques, comme au Silence des agneaux de Thomas Harris, les ouvrages de Dan Brown, ou encore le film mythique de David Fincher Seven. Et c’est peut-être d’ailleurs sur ce point que ce livre pèche, sans pour autant que cet écart ne soit capital : on a parfois l’impression que Daria Desombre a du mal à s’extraire de l’ombre de ses aînés. Si certains clins d’œil sont évidemment complices, donc sans que l’on puisse taxer l’écrivaine de duplication, d’autres moments sont par trop devinables pour qui aura lu ou vu les œuvres précitées.

    Un roman à suspense de bonne tenue, haletant et maîtrisé, qui a en outre le tact de ne jamais tomber dans la surenchère voyeuriste de scènes choquantes au prétexte de vouloir devenir mémorables. Mais Daria Desombre, avec le talent qui est indubitablement le sien, va devoir s’affranchir de ses prédécesseurs pour convaincre totalement.

    /5