Passé double

  1. Parce qu’elle meurt d’envie de refaire sa vie en Australie, Cindy Fromont accepte un emploi assez particulier : devenir la dame de compagnie de Rosemonde Busine. Mais lorsque cette dernière lui demande de modifier son apparence et de désormais se faire prénommer Hélène, Cindy comprend que son travail sera plus ambigu que prévu. Ce n’est d’ailleurs que le premier d’un des engrenages qui vont conduire à leur perte tous les protagonistes de cette étrange histoire.

    Patrick S. Vast nous enchante depuis quelques années avec des ouvrages forts et originaux, comme La Veuve de Béthune, Boulogne stress ou Angoisse à louer, pour ne citer qu’eux. A chaque fois, la structure du roman est la même, presque une signature : des individus lambda qui, au gré d’une situation d’apparence badine, vont s’entrechoquer et être broyés par une intrigue aux répercussions multiples et souvent fatales. Ici, il s’agit d’une quinquagénaire qui souhaite que Cindy prenne l’aspect et la place de sa fille, Hélène. Ce subterfuge sera à l’origine de bien des tensions et des morts, car les conséquences de ce manège vont aller bien au-delà de la simple badinerie. On retrouve en effet, en orbite autour de cette « nouvelle Hélène », des personnages nombreux. Jean, le fils alcoolique de Rosemonde. Gérard Alves, désormais entrepreneur dans la construction et dont l’entreprise est en équilibre précaire. Octave et Henriette, les deux domestiques de Rosemonde, ainsi que Marie, sa « rabatteuse ». Paul Froideval, dit Paulo, le compagnon d’infortune de Cindy, que les expédients louches n’effraient pas. Une délicieuse palette d’individus, à la fois simplement décrits et fort crédibles dans leurs attitudes et psychologies. On s’en doute, Patrick S. Vast saura les malmener, leur faire nouer des alliances éphémères, les monter les uns contre les autres, les faire céder à la tentation ou les pousser au crime. Une bien habile structure, solide et riche, où pas le moindre mot, paragraphe ou scène n’est en trop. Une écriture limpide, roulant avec plaisir sous les yeux du lecteur, glissant sur la soie de cette toile d’araignée au centre de laquelle, bien évidemment, on trouve Rosemonde Busine, prête à sortir ses chélicères. Et si, en plus, on apprend que sont en jeu des bijoux, un passé de cambriolages et un accident de la route, on peut être certain que des drames, voire des tragédies, vont survenir.

    Un nouveau régal littéraire de la part de Patrick S. Vast, qui, après Potions amères, signe donc ce deuxième livre aux Editions du Chat moiré. Sur son blog, on apprend que l’écriture du troisième tome est déjà bien avancée, et l’on ne peut que s’en réjouir.

    /5