Les Gens sérieux ne se marient pas à Vegas

  1. Foutraque Texas

    Patchwork vient de mourir. Le corps du guitariste du groupe Les Maîtres Nageurs est placé à l’arrière d’un véhicule mortuaire, tandis qu’Abel, autre musicien de la formation, l’accompagne pour son dernier voyage. Candie Brown, une belle jeune femme, se trouve sur la route de la procession. Le début des emmerdements ? Bien pire que ça : bien plus délirant que ça

    Serguei Dounovetz, à la bibliographie déjà bien chargée, libère ce roman aux éditions French Pulp. Dire qu’il a laissé aller son imagination débordante ne serait qu’un doux euphémisme. Il est en effet impossible de résumer la suite des événements, car ces derniers, tous plus improbables les uns que les autres, vont débouler sur la piste de cet opus échevelé comme les billes surnuméraires d’un flipper et faire tilter tout l’ouvrage. Quelques exemples ? Avec grand plaisir : une photographie d’un cercueil et d’une naïade dans le plus simple appareil qui va faire basculer l’existence de nombreux personnages, un Indien apparemment très altruiste mais en réalité proxénète, deux shérifs complètement fissurés et psychopathes (mais les chiens ne font pas des chats puisqu’ils sont père et fils), le légendaire groupe de musique Exotic Lizard qui s’apprête à remonter sur scène (alors qu’il n’a jamais existé…), des vampires, Mae West, l’ancien gouverneur du Texas et sa belle-fille à l’arrière-train incendiaire, etc. Un véritable chambardement des événements, multipliant les références à la musique rock et punk, au gré d’interactions excentriques et déstructurées, que Serguei Dounovetz disperse avec le geste auguste du semeur. C’est volontairement décalé, déjanté, inclassable. L’écrivain aurait probablement pu construire une colonne vertébrale plus conséquente, un fil rouge ou une intrigue plus rassembleuse pour agréger ces sketchs et autres protagonistes à peu près aussi déstructurés que leurs apparitions et relations, car des lecteurs lui reprocheront certainement ce chaos scénaristique à peine dompté (nous passerons sous silence les multiples fautes et coquilles, irritantes). Cependant, il est indéniable que Serguei Dounovetz s’est avant tout fait plaisir tout en transmettant cette jouissance burlesque à son lectorat, pour peu que ce dernier soit friand des univers sciemment extravagants à la Quentin Tarantino. Car, dans le fond, pour reprendre le titre des Rolling Stones, ce n’est pas de la littérature : It's Only Rock'n'Roll (but I like it).

    /5