La mère de Lane, seize ans, vient de se donner la mort en se pendant. Elle est accueillie par ses deux grands-parents, Yates et Lillian, les parents de la défunte, dans leur domaine des Roanoke. Dix ans plus tard, Allegra, la cousine de Lane, disparaît. Ce n’est pas la première fois que les « filles de Roanoke » connaissent des fins tragiques. Mais peut-être est-ce l’enquête que va mener Lane qui permettra de refermer définitivement les plaies béantes de cette propriété.
Ce deuxième roman d’Amy Engel, après The Book of Ivy, saisit littéralement à la gorge. Un ouvrage dur, éprouvant, aussi moite et irrespirable que ne l’est la canicule qui s’abat sur cette portion du Kansas. Une écriture élégante, féminine en diable, mettant habilement en valeur les sentiments de ses personnages, depuis les amours éconduites aux travers moraux, en passant par les troubles et parfois fracassantes spontanéités de l’adolescence. Le lecteur est immédiatement plongé dans ce bain délétère, avec le rappel par Allegra des diverses femmes ayant vécu une existence ayant mal fini : Jane, Sofia, Penelope, Eleanor, Camilla, Emmeline. Des trajectoires fracassées, brûlantes, dont on devine rapidement l’origine de l’horreur : Yates, le grand-père. En apparence, un bel homme, portant élégamment son âge, avec une réelle piété familiale toujours vissée aux lèvres, déclinée en belles paroles et propos presque dévots. Mais un monstre se cache sous cette enveloppe magnétique et envoûtante : un pervers sexuel, incestueux, ayant rendues enceintes ses filles et petites-filles. Dit ainsi, on touche indéniablement à l’immonde, à l’ignominie pure, d’autant que ses victimes, consentantes, étaient particulièrement jeunes au moment des actes, répétés. Et toute la force d’Amy Engel est justement de rendre cette bestialité sans la moindre surenchère, sans scène explicite. Lane, avec ses errances sexuelles avec tant d’autres hommes, retrouvera à Osage Flats Cooper, son amour de jeunesse, avec qui elle a tant partagé, et c’est en partie cette puissante inclination, presque animale, qui lui permettra de trouver la force d’affronter ses démons les plus intimes. Un récit particulièrement acide, toxique, saturé de ténèbres contagieuses, et paradoxalement peuplé de personnages humains, criants de vérité et de bonté, parmi lesquels on retiendra le portrait psychologique d’Allegra, jeune femme aux formes avantageuses, en plein désarroi, obsédée par ces mots qu’elle grave un peu partout et dont l’un d’entre eux mettra Lane sur la voie de la vérité. Car cette dernière n’est pas si évidente et prévisible que cela : un ultime rebondissement, saisissant, viendra clore ce roman sidérant de gravité.
Un opus mordant, encensé à juste titre par L. S. Hilton, et qui n’est pas sans rappeler la plume et l’univers de Gillian Flynn. Une pépite de noirceur.
La mère de Lane, seize ans, vient de se donner la mort en se pendant. Elle est accueillie par ses deux grands-parents, Yates et Lillian, les parents de la défunte, dans leur domaine des Roanoke. Dix ans plus tard, Allegra, la cousine de Lane, disparaît. Ce n’est pas la première fois que les « filles de Roanoke » connaissent des fins tragiques. Mais peut-être est-ce l’enquête que va mener Lane qui permettra de refermer définitivement les plaies béantes de cette propriété.
Ce deuxième roman d’Amy Engel, après The Book of Ivy, saisit littéralement à la gorge. Un ouvrage dur, éprouvant, aussi moite et irrespirable que ne l’est la canicule qui s’abat sur cette portion du Kansas. Une écriture élégante, féminine en diable, mettant habilement en valeur les sentiments de ses personnages, depuis les amours éconduites aux travers moraux, en passant par les troubles et parfois fracassantes spontanéités de l’adolescence. Le lecteur est immédiatement plongé dans ce bain délétère, avec le rappel par Allegra des diverses femmes ayant vécu une existence ayant mal fini : Jane, Sofia, Penelope, Eleanor, Camilla, Emmeline. Des trajectoires fracassées, brûlantes, dont on devine rapidement l’origine de l’horreur : Yates, le grand-père. En apparence, un bel homme, portant élégamment son âge, avec une réelle piété familiale toujours vissée aux lèvres, déclinée en belles paroles et propos presque dévots. Mais un monstre se cache sous cette enveloppe magnétique et envoûtante : un pervers sexuel, incestueux, ayant rendues enceintes ses filles et petites-filles. Dit ainsi, on touche indéniablement à l’immonde, à l’ignominie pure, d’autant que ses victimes, consentantes, étaient particulièrement jeunes au moment des actes, répétés. Et toute la force d’Amy Engel est justement de rendre cette bestialité sans la moindre surenchère, sans scène explicite. Lane, avec ses errances sexuelles avec tant d’autres hommes, retrouvera à Osage Flats Cooper, son amour de jeunesse, avec qui elle a tant partagé, et c’est en partie cette puissante inclination, presque animale, qui lui permettra de trouver la force d’affronter ses démons les plus intimes. Un récit particulièrement acide, toxique, saturé de ténèbres contagieuses, et paradoxalement peuplé de personnages humains, criants de vérité et de bonté, parmi lesquels on retiendra le portrait psychologique d’Allegra, jeune femme aux formes avantageuses, en plein désarroi, obsédée par ces mots qu’elle grave un peu partout et dont l’un d’entre eux mettra Lane sur la voie de la vérité. Car cette dernière n’est pas si évidente et prévisible que cela : un ultime rebondissement, saisissant, viendra clore ce roman sidérant de gravité.
Un opus mordant, encensé à juste titre par L. S. Hilton, et qui n’est pas sans rappeler la plume et l’univers de Gillian Flynn. Une pépite de noirceur.