Hemlock Grove

  1. Loup y es-tu ?

    Hemlock Grove, une ville de Pennsylvanie modelée par un passé sidérurgique. Le cadavre d’une jeune femme vient d’être retrouvé, tellement amoché que l’on en vient à penser à l’œuvre d’une bête sauvage. Dans le même temps, deux adolescents vont se rencontrer. Peter Rumancek, un Gitan nouvellement arrivé dans les parages avec sa famille, et Roman Godfrey, dont la famille a contrôlé la métallurgie locale. Un duo improbable de jeunes hommes, qui va lentement remonter la piste du vargulf, ce loup mythique qui tue sans pour autant avoir faim.

    Voilà un roman qui revisite habilement le thème du loup-garou. Une simple relecture ? Non, assurément pas : il lui donne même un sacré coup de fouet. On se laisse immédiatement emporter par l’écriture de Brian McGreevy, jeune auteur très talentueux. Ses mots sont durs, raboteux et poétiques, acerbes, souvent teintés d’un humour noir, de passages assez crus quant au sexe, et de réflexions philosophiques voire métaphysiques. Les personnages qu’il met en scène détonnent dans la littérature consacrée à la lycanthropie. Roman, héritier d’un empire industriel, dont les autres membres de la famille dissimulent également de nombreuses zones d’ombre, se scarifie, est doué d’un pouvoir de persuasion radical et irrationnel sur ses congénères, et aime céder à la tentation de la chair. Peter peut se transformer en loup, en descendant d’une longue et étrange lignée d’individus influencés par les croyances bohémienne et également hindoue. Entre eux deux va naître une phénoménale histoire d’amitié, mais également une découverte réciproque de leurs univers respectifs tandis que seront mis à jour de sidérants secrets de famille. Il y a également d’autres protagonistes dans cette intrigue, plus en arrière-plan, comme Shelley, la sœur de Roman, immense jeune fille grande comme un titan et au visage déformé, et bien d’autres encore, qui auront tous leur rôle à jouer dans ce livre. Cependant, on se gardera bien d’aller au-delà pour ne rien déflorer. Car, s’il y a bien un aspect qu’il faut retenir de cet ouvrage de Brian McGreevy, c’est son côté explosif. Non seulement il emprunte les codes classiques du loup-garou, mais il se permet également de les faire sauter au gré de saynètes hallucinantes, de digressions pertinentes, et de moments particulièrement farouches.

    Bien évidemment, il faudra apprécier ce type d’histoire pour totalement être conquis. Néanmoins, l’écrivain y incorpore une telle fougue et un côté policier mâtiné de fantastique qu’il est bien difficile de résister à cet envoûtement, ou plus exactement, à sa morsure.

    /5