Les Larmes noires sur la Terre

  1. Bienvenue chez les chiens de la casse

    Quelque part en France, dans un futur proche.
    Moe est une jolie jeune femme originaire des îles. Elle y rencontre Rodolphe et le courant passe bien. Il voudrait la ramener en métropole et l'épouser. Il n'y a pas d'avenir pour elle sur l'île et Moe est amoureuse. Elle accepte. Mais peu à peu, Rodolphe change. Il boit. Il est violent. Sa mère, qui vit avec eux, laisse faire. De toute façon, elle n'aime pas cette colorée qu'a ramenée son fils. Et puis survient l'enfant. Mais Rodolphe ne touche plus Moe depuis longtemps, sauf avec ses poings. Il sait, il est aigri. Il boit, plus. Il tape, plus fort. Alors un jour, avant qu'il ne soit trop tard, Moe prend l'enfant avec elle. Elle part.

    Qui a déjà lu Sandrine Collette sait que ses romans sont durs mais pas totalement désespérés. Les personnages sont généralement en proie à de grandes difficultés, pour ne pas dire des horreurs, mais tiennent debout, vaille que vaille. Les Larmes noires sur la terre en est la parfaite illustration.
    Moe pensait fuir l'enfer, mais elle est vite rattrapée par les autorités et envoyée à la Casse. Ce camp de malheur où l'on parque les marginaux et les délinquants, qui se voient attribuer une vieille voiture comme unique logement – une caravane pour les plus chanceux. Un lieu dont on ne ressort que les pieds en avant ou moyennant une somme d'argent impossible à amasser. Il faut travailler à la Casse, des heures durant le dos plié dans les champs, pour un salaire de misère. Bien qu'elle peine à l'aimer, Moe ne veut pas abandonner l'enfant. Mais travailler avec lui n'est pas permis. Heureusement, dans ce microcosme où prévalent la loi de la jungle et les coups fourrés, il se trouve quelques belles âmes. Et lorsqu'on lui a imposé cet emplacement, la jeune femme aurait pu plus mal tomber. Elles sont cinq : Ada, Jaja, Marie-Thé, Poule et Nini. Cinq femmes à se serrer les coudes, à partager leur pécule, leur repas, leur journées. Elles acceptent Moe et l'enfant.
    Cette galerie de femmes, debout malgré l'adversité, est rendue avec une grande bienveillance par Sandrine Collette. Difficile de ne pas les prendre en affection malgré leurs défauts, mais qui n'en a pas. Les épreuves ne manqueront pas pour Moe et ses compagnes d'infortunes.
    L'auteur est peu diserte concernant l'origine de cette « Casse ». Quand est-ce arrivé ? Qui l'a mise en place ? Pourquoi ? Le roman apporte en vérité plus de questions que de véritables réponses, mais c'est là aussi que réside tout son intérêt.

    Dur mais profondément humain, Les larmes noires sur la terre – roman davantage dystopique que policier soyons clairs – est une nouvelle réussite à mettre au crédit de Sandrine Collette, qui parvient à garder une constance dans ses textes tout en se renouvelant à chaque fois. Une gageure.

    /5