Metamorphosis

  1. San Francisco, 1899. Une foule de badauds s’amoncelle le long du rivage afin d’assister au repêchage du cadavre d’un Chinois, égorgé. Parmi ces anonymes, Harry Houdini, en pleine tournée californienne. Il est rapidement sollicité par Ong Lin Foon qui lui demande de retrouver sa nièce, probablement enlevée par une triade afin de nourrir les rangs des bordels locaux. Houdini accepte.

    Ce premier ouvrage de la série mettant en scène Houdini en détective séduit de bout en bout. Vivianne Perret, en narratrice rouée, sait rendre avec talent le San Francisco de l’époque, avec ce que cela compte d’événements, lieux et situations atypiques : le quartier de Chinatown insécurisé, replié sur lui-même, et en proie à de nombreuses luttes territoriales et politiques. Les Chinois, immigrés parfois victimes de racisme de la part des Blancs, avec leur culture, leurs fumeries d’opium et leurs tripots douteux, les pègres multiples et les tueurs retors nous sont rendus avec justesses, sans romantisme ni manichéisme. Dans le même temps, c’est un véritable régal de suivre le jeune Houdini, alors âgé de vingt-cinq ans, et d’en apprendre plus sur lui : ses tours de prestidigitation, ses penchants pour l’escapologie, son hygiène physique et sa morale irréprochable. Sa jeune épouse Bess est également un personnage intéressant, attachante et sachant faire preuve d’une autorité bienveillante sur son homme, tandis que Jim et Cricket, deux jeunes pickpockets, vont venir s’agréger à ce duo d’illusionnistes. L’intrigue est également très prenante, bien plus dédaléenne que ce qu’il paraît de prime abord, et va amener Harry Houdini à se frotter à de sinistres individus, dont un mercenaire coutumier de la mise en scène esthétique des cadavres de ses proies. Aucun temps mort dans ce livre, avec, en refermant l’ultime pages, des souvenirs qui resteront longtemps en tête, comme la scène où l’illusionniste se fait fort de ridiculiser tout un commissariat en se débarrassant des multiples menottes dont il est chargé, ou les conditions si brutales et inhumaines où étaient traitées les prostituées asiatiques.

    Si Harry Houdini apparaît dans quelques ouvrages de la littérature policière, Vivianne Perret a su, avec intelligence et humanité, en faire un étonnant et crédible héros récurrent de sa série, sans jamais dénaturer l’homme ou la légende. Une prouesse qui passionnera donc autant les amateurs de récits à suspense que ceux que la magie et l’illusionnisme intriguent, à savoir tous les gamins qui ne sommeillent que d’un œil en nous.

    /5