Les Fils d'Odin

(Odins Söhne)

  1. Il faut sauver Hilde

    Début 1945. Alors que l’Allemagne nazie vit ses ultimes semaines, Hilde, amie de Richard Oppenheimer, se voit accusée du meurtre et de la mutilation de son ex-mari Erich Hauser. Pour l’ancien commissaire et désormais veilleur dans une banque, il est impossible que cette femme soit coupable, aussi se met-il à enquêter sur ce crime. Une investigation qui va le mener jusqu’à une société secrète particulièrement dangereuse.

    Après Germania, voici le deuxième volet de la série consacrée à Richard Oppenheimer. Harald Gilbers signe un ouvrage particulièrement saisissant, très documenté, qui rend presque palpable l’ambiance si particulière dans le Berlin de cette fin de Seconde Guerre mondiale. Les bombardements, la paranoïa croissante, la terrible peur de l’invasion soviétique, les luttes intestines entre opposants et partisans du régime en place, tout est rendu avec beaucoup de talent et d’intelligence, dans un ahurissant panorama d’apocalypse et d’épouvante. Dans le même temps, l’intrigue est également bien construite. Hauser, ancien médecin à Auschwitz, revient avec une proposition de trafic, sept cent vingt litres de morphine contre de l’argent, et c’est au terme d’un échange qui tourne mal que l’on retrouvera Hauser mort, privé de sa tête et de ses mains. Règlement de comptes mafieux ? Trafiquants trop gourmands ? Exécution politique ? Toutes les pistes seront abordées au gré de ce roman de plus de cinq cents pages, vif et noir. Certains passages retiendront certainement l’attention du lecteur, comme les mécanismes de la justice lors du procès de Hilde, où certains zélés adeptes du régime hitlérien tentent encore de se distinguer, les quelques pages abominables consacrées aux expérimentations des sulfamides sur les prisonniers, ou les moments de pure angoisse pour la population berlinoise lorsqu’approchent les bombardiers alliés et qu’il faut au plus vite rejoindre les abris collectifs (dans le même genre, on peut également s’orienter vers Blackout Baby de Michel Moatti).

    Un livre fort et prenant, même si cette secte ésotérique, contrairement à ce que laisse supposer le titre, n’entre finalement que peu – ou tard – en ligne de compte dans l’intrigue. Un roman qui plonge son lectorat dans une atmosphère particulièrement troublée et anxiogène, et qui donne envie de se ruer sur sa suite, Derniers jours à Berlin.

    /5