La Carne

  1. On achève bien les chevaux

    Brouchon, un chirurgien vieillissant. Elisabeth, sa femme, plus jeune que lui, stérile et disposant de nombreux appâts pour séduire les hommes. Dansec, le nouveau praticien et collègue de Brouchon, qui n’est pas insensible aux charmes d’Elisabeth. Marc, directeur d’un haras. Nader, palefrenier. Et La Carne, cette jument indomptable et irascible. Tous ces destins vont se télescoper dans un manège où se mêlent amours, passions contrariées, rancœurs et dissimulations.

    Cet ouvrage de Guy Lefebvre est son premier à paraître chez l’éditeur Fleur sauvage. Court (environ cent-quatre-vingts pages), ce roman fait intervenir une belle diversité de personnages. Tous bien dépeints, en quelques mots ou phrases savamment tournés, ils vont, en raison des liens qui les unissent, être amenés à s'affronter. Avec un style épuré qui n’empêche nullement les belles tournures littéraires, l’auteur signe un livre efficace et prenant de la première à la dernière page. C’est également un croquis adroit de la solitude et de l’abandon, de l’espoir qui anime les âmes et les chairs déclinantes, où les mots de l’auteur se posent avec beaucoup de justesse. L’intrigue, classique mais particulièrement humaine et crédible, se rapproche de celles de Georges Simenon, avec cette belle économie d’événements, mettant davantage en relief paysages et psychologies. Ce qui retient le plus l’attention, c’est finalement la présence de ce cheval, cet animal dangereux et tempétueux, qui deviendra le détonateur enfoui au milieu de cet amas d’animosités et d’inclinations.

    Peut-être certains amateurs de littérature policière auraient préféré un ou deux rebondissements supplémentaires, tandis que d’autres regretteront à coup sûr les nombreuses fautes et coquilles disséminées dans le roman. Néanmoins, cette Carne est assurément un bon ouvrage, intelligemment écrit, plausible et racé.

    /5