Touriste de bananes

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  • 9/10 Oscar Donadieu, 25 ans, est à bord de "l’Île de Ré", un bateau qui fait route à destination de Thaïti. Lors du trajet, dans le Pacifique, le bateau croise "l’Île d’Oléron", et arrête sa course. On transfert le commandant Lagre qui est aux arrêts et qui doit être reconduit à Papeete pour y être jugé. Alors que "l’Île d’Oléron" avait quitté Thaïti depuis 3 jours, Lagre, la cinquantaine, marié avec enfants, a tué son troisième officier, Henri Clerc, âgé de 25 ans. Derrière ce drame, se cache une histoire de jalousie pour une femme, Tamatéa, une prostituée locale.

    Oscar Donadieu connaît le commandant Lagre, un ancien capitaine de son père, quand Donadieu vivait encore et était le plus puissant armateur de La Rochelle. C’est pour cette raison qu’à 12 ans, Oscar fut le parrain d’un des enfants de Lagre.

    Pour Oscar Donadieu, Thaïti est l’endroit rêvé pour vivre sereinement, loin du monde. Il est ainsi qualifié de « touriste de bananes », expression pour désigner des passagers qui partent sur les îles avec l’idée d’y vivre une vie naturelle, sans souci d’argent, en se nourrissant de bananes et de noix de coco… Ils cherchent une hutte abandonnée, s’y installent et après quelques mois, anémiés, malades, ils cherchent à se faire rapatrier en urgence.
    Oscar Donadieu n’est pas comme ça. Il veut montrer que sa motivation est sincère et qu’il peut être fort.

    Après quelques jours passés en ville, le temps que la saison des pluies s’arrête, il part et trouve une hutte abandonnée, par un Allemand qui y est mort, à deux cents mètres de la cascade de Papeari. Il s’y installe et vit de sa pêche, quitte à manger des poissons qui le rendront très malade. Mais il s’entête à rester dans cette vie sauvage, malgré la proposition du gouverneur, connaissant et respectant la famille Donadieu, d’un emploi dans l’administration locale, et celle du maréchal de gendarmerie Nicou, de le marier à sa fille.
    C’est seulement le procès de Large qui le fera revenir en ville. Mais Oscar sera terriblement déçu par cette parodie de justice, par la comédie jouée par le procureur général et par l’avocat, des silhouettes sans consistance.
    Il prend ainsi conscience que tout est fini pour lui. Il est fatigué, tant physique que moral, fatigué comme un mort. Lui, qui toute sa vie durant s’est obstiné à chercher quelque chose de beau, est désespéré de la nature humaine. Et c’est toute l’histoire de sa famille qui lui revient en tête : cherchait-il profondément quelque chose ou à fuir autre chose ?

    Simenon poursuit et conclut, avec Touriste de bananes, l’histoire du drame de la famille Donadieu, commencée avec le magnifique Testament Donadieu. Les multiples personnages, les situations, comme les paysages contribuent à magnifier la lourdeur, la noirceur de l’histoire. Au final, Touriste de bananes est un livre attachant, bouleversant de noirceur mais désespérément beau.

    07/07/2018 à 11:53 JohnSteed (545 votes, 7.7/10 de moyenne) 3