schamak

104 votes

  • 1991

    Franck Thilliez

    4/10 J’ai lu mon premier Thilliez.

    Je m’attendais à un roman policier globalement efficace (je me suis dit qu’avec une telle réputation le gars avait, à minima, du métier et connaissait son affaire), mais je savais que d’un strict point de vue formel, je lirais un livre avec une écriture sans aspérité, sans émotion. Un roman de gare 2.0 sous influence série US, balisé à mort, sur-expliqué (règle d’or : le lecteur doit tout bien comprendre) qui une fois lu serait oublié aussi sec. du genre vite lu.
    Et c'est précisément ce que j’ai trouvé.
    
Donc pas de surprise. Ni bonne, ni mauvaise.

    Alors, oui, on peut le lire sans risque. Comme on peut s’en foutre royalement tant sa lecture est largement dispensable.

    1991” n'est ni mauvais ni bon. Il ne provoque et n’engendre pas grand chose, presque rien. Il divertit oui, mais à peine tant certains traits sont grossiers. 
Ce petit fumet de revival, les années 90, pourrait faire sourire les quinquas nostalgiques. C’est peu et c’est chiche.

    Si toutefois le roman ne provoque pas d’ennui (c’est déjà pas mal me direz vous à raison car c’est terrible de se faire chier en lisant), il ne captive pas vraiment non plus. Il se suit sans déplaisir et sans enthousiasme. Il se suit. Alors, j’ai suivi, juste pour aller au bout et avoir le fin de mot de l’histoire. Alors, ce fin mot ? Bah, là encore, ça n’a rien de super original (depuis le premier Grangé LES RIVIERES POURPRES, beaucoup d’auteurs ont décliné un peu le processus, et puis faut dire que je ne suis pas super client de tout ce qui a trait aux expériences génétiques….) Mais bon, si je tire aussi à boulets rouges sur l’intrigue , il ne resterait rien à se mettre sous la rétine puisque le seul atout repose justement sur elle, l’intrigue. Tout le reste ne présente guère d’intérêt. 

    Alors disons que l'histoire n’est pas plus bête qu’une autre. Et puis, c’est documenté et ça a l’air crédible. On se console comme on peut. Je pardonne même cette fin expédiée, décevante, comme souvent dans les thrillers qui s’obstinent à ouvrir mille tiroirs. Possible que Thilliez devait en avoir marre.

    Voilà, j’ai donc lu “1991” tranquillement, sans bailler, sans excitation, sans effort, sans lever un sourcil d’étonnement, sans me sentir mal à l’aise ou bousculé dans ma lecture, sans pousser de soupir de lassitude ou de satisfaction non plus. Bref, j’ai lu Franck Thilliez et ça m’a fait ni chaud ni froid même si de temps en temps je n’ai pas pu m’empêcher de me parler à moi-même “C’est donc lui le gars qui vend ses ouvrages par palettes depuis 10 piges, encensé par les aficionados du thriller ? D’accord, bien, très bien….”
Encore une fois, le roman en lui-même n’est pas infamant, il remplit grosso modo le cahier des charges du roman policier moyen (mais dans la moyenne basse quand même) où l’auteur capitalise tout sur son intrigue.

    Un policier sans le charme suranné d’un Simenon.

    Sans même la nervosité narrative d’un Norek.
    Beaucoup de mots, plein de descriptions sensationnalistes pour créer un malaise mais qui tourne à vide, qui sonnent creux, de l’empilage, de l’inutile, de la surenchère. Du mièvre aussi (chez Thilliez, les femmes amoureuses de flic, décidément, sont des cruches). 
Vous l'avez compris, on ne s’éternise pas sur l’écriture, le profondeur des personnages. 

    Thilliez écrit bien. Du bon français, nickel. Une longue rédaction de 500 pages proprettes, mais l’audace, la folie, les trouvailles stylistiques ; pour transmettre des émotions palpables, des frissons, …faudra repasser.

    Forcément, sans style, l’ambiance est à l’image de la forme, factice, surfaite. Pas de relief.

    Attention, le roman comme son héros ne sont pas désincarnés (car créer volontairement des personnages sans émotion peut justement en provoquer). Ils sont conventionnels, c'est très différent, conventionnel dans leur caractère, leur voix, leurs mots. En un mot INTERCHANGEABLE. Et fades. 

    Pourtant, Thilliez se donne du mal pour faire exister son Sharko et créer des scènes fortes, il essaie avec ses moyens, ses artifices, mais c'est tout le paradoxe du livre, de l’auteur, de son écriture ; en dépit de tout ce travail, tout ça demeure très académique. Tout comme ses dialogues empesés, si peu naturels, tellement didactiques (rappel : le lecteur est un neu-neu, et doit tout comprendre). Et cette sensation tenace que l’auteur pourrait remplir des pages et des pages qu’il ne parviendrait toujours pas à insuffler un peu de vrai et d’intériorité, des sensations authentiques. Parce que voilà, quand t’as pas le truc (la patte, la musique, le petit supplément d'âme, on appelle ça comme on veut) pour créer la gêne, fabriquer l’inconfort, distiller le malaise, ou provoquer le dégout chez le lecteur (et ça ne passe pas par la surenchère, il serait temps que les auteurs de thrillers franchouilles le comprennent), bah rien à faire, ça ne fonctionne pas.
    Dans ce roman inodore et incolore, mais clairement inoffensif, une seule chose m’a vraiment gonflé, c'est l’infantilisation du lecteur. Dialogues abêtissants et enfilades de questions (une spécialité Thilliez apparemment) pour créer ou intensifier son mystère. C'est relou et même assez humiliant.
    Quoi d’autre ? Ah oui, zéro humour dans ce livre. 
Mais alors, rien du tout.
    Bref, j’ai lu mon premier Thilliez. 



    19/07/2021 à 21:49 6

  • A la place de l'autre

    Guy Rechenmann

    8/10 À tous les amateurs d’action, les aficionados de rythme endiablé, les assoiffés d’hémoglobine, ce livre…n’est clairement pas pour vous !

    Pas de frissons.
    Pas de carambolages.
    Pas de coups de feu.
    Pas de poursuite.
    Pas de twist final.

    Non.

    A LA PLACE DE L’AUTRE n’est pas spectaculaire pour deux ronds.
    C’est MIEUX que ça.

    Ce roman policier se lit de préférence dans un rocking-chair, les doigts de pieds dans des pantoufles avec un feu de cheminée pas loin.

    J’ai passé un très bon moment.
    Non, plus que ça : un délicieux moment.

    Ce roman est une précieuse gourmandise.
    On ne se bâfre pas avec.
    On savoure.
    On déguste.

    Nous connaissions Simenon et son Maigret à la pipe, Vargas et son « pelleteur de nuages » Adamsberg, voici Rechenmann et son « brasseur de vagues » Viloc.

    20-30 pages, c’est ce qui m’a fallu pour me laisser apprivoiser (bercer pour rester dans le ton maritime) par cette exquise indolence, cette lenteur (ne pas confondre avec longueur, la lenteur - dans l’Art - est une qualité pour moi) ouatée, cet humour souvent subtil ou débonnaire (de Anselme ou de son boss Plaziat jamais le dernier pour chambrer son flic), ces personnages lunaires et extravagants (Lucy, cette gamine incroyable).
    Et je préfère ça à des thrillers qui démarrent tambour battant avant de s’essouffler rapidement pour finir asthmatiques dans un dénouement (souvent guère crédible). ci, on prend son temps. Et on profite de la vue, du paysage, des senteurs, des mélodies. C’est un roman contemplatif pour jouisseur, pour oisif.

    Un roman pour les "lecteurs tortues".
    Et dans cette littérature actuelle de roman noir et autre thriller où ça fulgure à tout va, ça fait rudement du bien.

    Ici, les indices et les révélations se font presque de manière statique : on observe, on taille la bavette avec la voisinage, on épluche des archives, on spécule des théories fumeuses, on phosphore (l’auteur a du lire du Vargas, je pense), on fait des croquis. On y croise des chats (l'auteur les affectionne si j'en crois un de ses romans"le choix de Victor") , les pieds dans la vase, un médium, on évoque les esprits, les Egyptiens, ….
    Et c’est ainsi, de cette façon bancale, à tâtons, (à l’aveugle pour faire référence à la comparaison canine du comparse dessinateur), mais progressive et sans avoir l’air d’y toucher, de manière farfelue, ubuesque même, poétique souvent que l’énigme se détricote, fil après fil.
    Même les cadavres (et y’en a !) font partie de ce décorum tranquille. Ils tombent certes, mais sans tambour ni trompette. Le lecteur découvre ça au calme, sans surenchère, presque de façon surréaliste.
    Et j’aime ça.

    Certains diront que c’est un peu trop facile, peu crédible et même paresseux. Je ne sais pas. Surtout, je m’en fous. Je me suis laissé porter par cette paresse, cette léthargie jubilatoire, mais aussi cette humanité, ces anti-héros attachants, à leurs idées saugrenues, leurs bons mots, leur causticité, leurs sous-entendus…Moi qui ai beaucoup lu Ken Bruen (ou son personnage fétiche Jack Taylor résous souvent ses enquêtes accidentellement et en traînant la patte) j’applaudis. Car j’aime cette nonchalance, ce sentiment (faussement) passif qui habite les enquêteurs qui « aspirent » et inspirent la vie, toujours prompts à humer l’air marin, à écouter de la musique. Ainsi, même si l'intrigue reste l’attrait principal, tout ce qui gravite autour ajoute à cette atmosphère cotonneuse, musicale, poétique, qui pousse à la rêverie. Dans l’humour (avec moins d’acidité et de noirceur néanmoins, mais avec cette espèce de léger désenchantement), j’ai pensé à mon auteur contemporain préféré, le toulousain Jean Paul Dubois. J’ai aimé également les clins d’oeil ou les insertions de personnages de romans précédents (le dessinateur Léonard). J’ai aimé la tendresse délicate du héros vis à vis de sa nièce ou de sa femme (deux lignes où cette dernière l’attend sans un mot, un soir, ce amènera après coup la jolie confidence : « j’ai reconquis ma femme »).

    Des bémols ? Si peu. Bon je regrette quand même qu’on en sache si peu sur Sofia (peut-être qu’elle est plus présente dans les précédents opus), idem pour Solange dont les ébats avec Jeremy servent surtout de ressort comique. C'est bavard. Oui. Très. Mais c'est pas vraiment un reproche, ça fait partie des personnages et ce verbiage est un ingrédient essentiel au charme qui est distillé tout au long du récit.

    L’intrigue est très bien construite, captivante sous son air pépère, et historiquement intéressante (on y parle de la seconde guerre mondiale, de la collaboration, de la résistance, du mur de l’Atlantique…), on apprend des choses sans avoir le sentiment qu’on nous les assène. C’est fait modestement, par petites touches. La relative légèreté des 200 premières pages va prendre une tournure grave et presque maudite lors des flash-back et de l'histoire de la petite Marie, de cette vie, ces existences marquées du sceau du malheur et de la fatalité.

    Encore un mot pour le style (une écriture parfois argotique, un peu à la Frédéric Dard, mais en plus léger et moins imagé, ça se boit comme du petit lait) : je trouve que c’est pas mal d’insérer les réactions des personnages à la suite d’une ligne de dialogue (dialogues nombreux, souvent succulents). Oui, Il m’a fallu là aussi quelques pages d’adaptation, mais ensuite, j’ai trouvé que ça ajoutait à la fluidité ; une bonne idée en définitive que d’éviter cette « cassure » d’aller systématiquement à la ligne. Bien vu.

    Je ne vais pas tourner autour du pot : j’ai déjà commandé FLIC DE PAPIER et FAUSSE NOTE (et prochainement sort le dernier opus)

    11/02/2018 à 22:06 4

  • Artifices

    Claire Berest

    6/10 Pendant 300 pages, j’ai été très intéressé, et même captivé par l’intrigue originale et mystérieuse à souhait.
    L’auteure construit progressivement, méthodiquement, habilement son puzzle d’autant que l’écriture, hybride, moderne, mais enlevée m’a séduit. Bref, je passais un très bon moment à lire ce roman (qui se lit comme un roman policier, mais plus ambitieux).
    Et puis, sur les 100 dernières pages, tout se précipite, ce qui n’est pas nécessairement une mauvaise chose, sauf que dans ce présent cas, je n’ai pas pu me départir de cette impression que l’auteur, impatiente, voulait se débarrasser de son histoire.
    La psychologie des personnages - deux femmes, Mila et Camille et un homme Abel - est assez fouillée, mais dans ce triangle amoureux, Camille est clairement le maillon faible tant j’ai eu du mal à croire à sa souffrance.
    Une fois le livre reposé et le soufflé retombé, je reste mitigé. Si je ne regrette en rien ma lecture qui m’a vraiment happé (le fond comme la forme) pendant les 3/4 du livre (même lorsque j’ai compris les tenants et aboutissants), mais je n’ai pas pu m’empêcher de penser qu’en dépit de la thématique intelligemment abordée (l’Art comme moyen de guérison après un traumatisme), il était difficile de comprendre et finalement de croire à cette histoire et aux motivations de ses protagonistes. Derrière le côté un peu baroque qui se dégage de ce roman audacieux dans son approche, il demeure au final et malgré tout quelque chose de factice, quelque chose qui sonne - volontairement ? - faux.
    En ce sens, avec ses interprétations multiples et cette impression d’esbroufe, le titre “Artifices” est très bien choisi.

    04/02/2023 à 21:54 2

  • Atmore Alabama

    Alexandre Civico

    9/10 Tu te procures ce livre direct.
    Tu regretteras pas. Promis, juré, craché.
    Non, tu n'en sauras pas plus.

    Va falloir me faire aveuglément confiance.

    25/03/2024 à 14:17 3

  • Au lieu-dit Noir-Etang...

    Thomas H. Cook

    7/10 Un roman sombre, "old school" dans sa forme (rien de péjoratif, au contraire), très bien écrit à l'image de ceux qu'écrit Robert Goddard, en plus mélancolique et plus profond, peut-être. Un suspense subtilement distillé et une dénouement qui renforce la noirceur de ce récit où le romantisme est intimement liée au tragique.

    Une bonne lecture.

    Prix Edgar-Allan Poe en 1997.

    02/02/2020 à 23:34 6

  • Aux animaux la guerre

    Nicolas Mathieu

    8/10 Légers SPOILERS !
    Beaucoup de plaisir à lire ce premier (!) roman.
    Ce qui, moi, m’a particulièrement séduit, c’est que les intrigues (le PSE ou le kidnapping) ne m’intéressaient pas plus que ça. Elles existent, mais en toile de fond comme pour nous mettre le doigt sur autre chose, nous ouvrir les yeux sur un autre enjeu, plus émotionnel. Au risque de me tromper, je pense qu’en effet l'objectif (de l'auteur Nicolas Mathieu) était ailleurs et que lesdites intrigues et leur relative absence de suspense ou d'explication (la fermeture de l’usine est courue d’avance et la cause du kidnapping de Victoria, bah c'est un kidnapping, quoi) servent surtout à dépeindre la misère…ou plutôt LES misères.
    Car, qu’on ne se méprenne pas, derrière la peinture économico-sociale, l’auteur jette avec ce roman noir choral (et bourré de références cinoche) une lumière blafarde sur une autre misère lente et bien plus destructrice : la misère affective. C’est pas innocent si Martel, sitôt après avoir été "rousté" à une pensée pour Rita qu’il connait à peine pourtant. Et puis, quand on réfléchit bien, entre lui et cette Rita, il manquait pas grand chose pour que ça tourne différemment, que le destin se décide à leur faire une fleur. Mais voilà.
    Cet absence cruel d’amour qui poussent presque tous les personnages victimes collatérales d’un chaos familial (les parents sont soit absents, morts, ou alités - mère de Lydie -) à se démerder avec ce bon système D quitte à fatalement faire des conneries.
    J’ai aussi apprécie que l’auteur évite quelques clichés, ici le gangster russe se rêvait à un autre destin que le sien. Bref, mine de rien, ça change des caïds au coeur de glaise. C'est ce genre de petites choses comme ça qui font mouchent et qui singularisent un roman de beaucoup d'autres...
    Deux scènes belles et franchement pas simples à réussir : celle du face à face entre Duruy père et Comore : y'a des silences, de l'honneur dans cette scène pleine de tension et, paradoxalement, de respect mutuel. Et enfin, la scène de sexe. Elle est crûe, mais pas tant que ça non plus et puis y'a cette cette légèreté, ces rires, cette innocence (parfois j'ai pensé à Larry Clark et ses "Kids"), cette vie qui contraste avec la scène de mort qui se joue en parallèle, dans la même maison.
    Côté écriture, là aussi, c’est vraiment bon. C’est classe, âprement poétique, racé en somme. L’auteur compose ainsi une patine intéressante et ce mariage de styles fonctionne très bien (sans oublier, les dialogues - exercice particulièrement périlleux - secs et réalistes, jamais verbeux).
    Bon, faut chipoter un peu ? Allez, par moments, il nous faut quelques secondes pour raccrocher les wagons (du fait de la multitude des personnages) et enfin, ce dénouement relativement ouvert, mais un tantinet frustrant même si j'aime aussi quand un auteur me laisser achever un roman à ma guise.
    Bravo

    28/03/2017 à 11:35 8

  • Billy Summers

    Stephen King

    5/10 250 premières pages qui se laissent lire.
    250 dernières pages poussives.
    Au final, un roman moyen qui pourrait plaire aux novices du genre, mais décevra les plus rodés.
    Ambitieux, longuet et parfois mièvre, Billy Summers passerait plutôt pour un polar lambda s'il n'était pas signé King.

    25/10/2023 à 07:44 3

  • Bull Mountain

    Brian Panowich

    4/10 C'est donc ça le roman dont tout le monde parle ?
    Les 20 premières pages promettent. Beaucoup.
    Mais voilà, plus jamais je n'ai retrouvé cette tension.
    Pire, petit à petit, ça décline. L'écriture elle-même devient moins bonne, moins percutante qu'au tout début. Le chapitres très - trop -courts (histoire de parler un peu de tout le monde, mais ça reste très en surface et n'approfondit en rien leur psychologie) plombent le rythme. Les dialogues - puériles - sont les plus gros défauts du roman, ils ne collent pas aux personnages qui en deviennent presque comiques. Les personnages perdent lentement de leur densité, leur psychologie s'étiole. Que dire du dénouement si ce n'est qu'il est expédié. L'action peu fluide, les affrontements terriblement et inutilement verbeux (à ce titre, le final est vraiment naze). Très vite, j'ai eu le sentiment que l'auteur a voulu épaissir son bouquin en meublant avec des scènes peu utiles et des bavardages peu crédibles, sur-explicatifs qui affadissent une intensité déjà peu présente.
    Une ENORME déception.

    22/07/2016 à 23:59 2

  • Ca restera comme une lumière

    Sébastien Vidal

    7/10 Je viens de terminer la lecture du beau et du bon roman de Sébastien Vidal. 

    L’histoire est des plus classiques ? Et alors ? 

    Les évènements plutôt prévisibles (encore que) ? Je m’en fous.
    L’auteur est plus à l’aise dans les scènes contemplatives, l’intériorité de ses personnages, le bouleversement des coeurs, que dans les scènes de mouvement ou les dialogues ? Certes, certes.

    Mais l’essentiel est là. L’ensemble, c’est du solide. Construction, narration, la charpente est robuste, costaude comme les sculptures ou les mains du vieil Henri ; ça fleure bon le métier, l’expérience, déjà.
    C’est bien écrit, très bien même. L’écriture est virtuose, souvent virevoltante. Ample, métaphorique (mais accessible), gourmande (certains tiqueront sur le florilège d’adjectifs, moi ça me va) en un mot : généreuse. 
Il y a du lyrisme, du romantisme dans les mots de Sébastien. Pas étonnant, l’auteur doit être peu ou prou comme son Josselin, un grand sensible (j’ai pas dit émotif, hein).
    Ok, ok, avoir du style, c’est bien, mais comment on fait pour garder cette patine tout du long ? Sébastien, lui, a su faire. J’ai été frappé par la constance de la forme Il y a de la régularité, de l’endurance et on ne répétera jamais assez la difficulté de tenir la distance sur des centaines de pages. Garder le rythme, le mental, l’énergie, l’envie, …dans ce marathon qu’est le roman, c’est pas une mince affaire. 
Sébastien y parvenu intégralement ou presque (un poil moins enlevé les 100 dernières pages ? Je sais pas). 
Le roman n’a pas du être écrit d’une traite, impossible. 
C’est donc du bon boulot. Bravo pour ça. Et respect.

    J’espère que l’auteur ne m’en voudra pas, mais je ne croyais pas que sa plume fut aussi belle, affutée, inspirée. C’est vrai que ça pullule d’images, de comparaisons, ça peut donner le tournis (difficile de se réfréner, hein ?), mais malgré tout, j’ai été impressionné par cette exaltation qui imprégnait ces lignes même si c’est dans sa fulgurante simplicité que l’auteur m’a le plus saisi (« la tendresse comme jardinier des souvenirs » pour ne citer que celle que j’ai pensé à noter). Il y en a d'autres qui impriment la rétine durablement et je me suis promis de retourner à la (Del)pêche (uh uh uh) de ce genre de phrases simples et belles dans leur dénuement, leur dépouillement. 
L’auteur a sacrément bûcher sur le sujet de la soudure, c’est stupéfiant de crédibilité. Il a été bien conseillé, mais là encore, c’est vraiment un sacré travail de documentation. Les longs et nombreux passages sur le travail de soudure, c’est de la pure poésie. Sans jamais tomber dans la redite en terme de vocabulaire, c’est fort.
    Bon, le roman est vendu comme un roman noir. Faut bien attirer le chaland, mais pour moi ce n’était pas l’intention première (la « noirceur » - y a largement pire - se fera plutôt sentir dans l’accélération des 50 dernières pages.) Paradoxalement, c’est quand l’auteur n’abordait pas son intrigue mafieuse que mon intérêt a été le plus prégnant. 
La vengeance, le mystère de la disparition du fils Thévenet, ce n’est pas ce que je retiens du livre, j’ai largement préféré les moments intimistes entre Josselin et Henri, les échanges qu’ils soient verbalisés ou non (oui, la gestuelle - pression de mains sur les épaules, les sourires, les regards…- est également mise à l’honneur), c’est ce que j’ai plus aimé, d’ailleurs c’est dans ce registre que j'ai senti l’auteur plus à son aise (avec la descriptions de la nature, j’y reviens). Les thèmes de la transmission, du partage, de l’apprentissage et des liens qui unissent les êtres amochés par la vie, les drames, tout ça, ça m’a plu aussi. 
Il est aussi question de la famille, pas nécessairement celle du sang, mais celle qu’on se fait (Henri est un père de substitution au même titre que Erwan est le frère que Josselin n’a jamais eu).
    
Le roman, c’est également une pluie d’hommages plus ou moins conscients.

    Hommage à l’Art (on peut remplacer la soudure avec l’écriture, la peinture, …), au travail, au gout de l’effort, de la persévérance, à l’humilité.
    Hommage à l’amitié. On repense à plein de films (l’auteur est également très référencé niveau cinoche).
    Hommage à certains auteurs/artistes (je sais aussi que Sébastien est un lecteur et fan de Bouysse, sans doute de Ron Rash, peut-être un amateur du cinéma de Mallick aussi ?).
    On y retrouve donc l’amour de la nature, de la terre, la référence à la petitesse de l’homme face à cette immensité terrestre comme céleste ; cette envie viscérale de sublimer, voire de personnifier, la nature et ses créatures (la chouette comme fil blanc du récit)
    Mais plus que tout, ce qui m’a le plus séduit, c’est l’absence de tricherie. 
Pour lire ça et là les posts de Sébastien, pour savoir ce qu’il lit (ou chronique) comme bouquins, écoute comme chansons, je sais que le fond du roman n’est pas une posture ou une volonté opportuniste de suivre une mode, rien de factice dans ce qui anime l’auteur mais surtout l'homme. Ce roman est donc cohérent avec ce qu’il est et ce que j’imagine de sa vie (non, non, on ne poste pas des photos de radis ou de je ne sais quel cucurbitacées sur Facebook pour faire son écolo).
    Ce roman lui ressemble beaucoup. Dans ses convictions, ses revendications, ses colères. Il parle de l’absurdité de la guerre, du cynisme des dirigeants du monde, des affres du capitalisme, de l’ultra consumérisme etc… tout ces thèmes sont autant de cris de Sébastien dans la bouche de Josselin, de Henri, même dans celle de personnages secondaires (l’infirmière qui évoque sans qu’on lui demande la pénurie de lits). Alors, on pourrait aussi lui reprocher que parfois, le procédé contestataire porte préjudice à un certain naturel ou à certaines réactions des personnages. Je m’explique. Je pense aux dialogues, très, (trop ?) écrits et qui marquent de manière trop voyante (pamphlétaires allais je dire) les intentions de l’auteur. Encore une fois, beaucoup d’auteurs utilisent leurs personnages pour porter leur propos mais ici, c’était peut-être trop surjoué (Josselin et Henri parlent comme des livres). Il n’en est pas moins vrai que la sincérité de Sébastien est incontestable.
    Les personnages sont travaillés, approfondis, avec leur part d’ombre et de lumière. L’auteur a fait une place à chacun, tous ont leur part d’humanité (même le grand Charles, tout salaud qu’il est, on le sent tout de même sincèrement dévasté par la perte de son fils). 
Josselin est un beau personnage même si, là encore, pour un type traumatisé, meurtri par la guerre et ses horreurs, rongé par la culpabilité d’être en vie par rapport à Erwan, je me serais attendu à ce qu’il soit moins loquace, moins littéraire. Il parle et écrit bien (cf. Son échange épistolaire avec son ami décédé). On sait qu’il est abîmé, physiquement et psychologiquement, pas de doute, les failles et le traumatisme sont là. Mais je ne l’ai pas assez senti car l’auteur ne m’a pas laissé l’espace pour cela, les mots, nombreux, clairvoyants, ont trop souvent colmatées ces fameuses brèches. Pour ma part, je n’ai pas besoin de tant de confidences, de tant d’explications, j’aime bien qu’on me laisse des blancs, des cases à noircir. Mais c’est un parti pris de l’auteur, je respecte, mais ça m’a empêché de faire ses douleurs miennes.
    J’aurai bien encore deux-trois chipotages à faire, mais ça ne changera rien à mon avis général, comme je l’ai dit, au tout début : ÇA RESTERA COMME UNE LUMIERE de Sébastien Vidal est un bon et beau roman que j'ai lu en quelques jours.

    03/05/2021 à 00:33 2

  • Cabossé

    Benoît Philippon

    4/10 Un premier roman noir, voire très noir, avec un potentiel énorme. Mais c'est raté et surtout c'est très frustrant.

    La faute à une écriture qui se regarde un peu trop, qui cherche trop à épater, à impressionner. A force d'abuser de l'argot, de chercher la bonne répartie (notamment dans les dialogues souvent ratés car), l'histoire et les personnages perdent en crédibilité et en psychologie (le héros qui parfois s'exprime super bien en terme de tournure d'esprit alors qu'il est dépeint comme un gars pas franchement cultivé ou éduqué). Au contraire, à l'image d'un Franck Bouysse avec "GROSSIR LE CIEL" il aurait valu que le héros soit un taiseux, l'impact aurait été plus fort et la psychologie du personnage plus authentique et plus émouvante. Mais bon, là le verbiage est excessif, l'auteur surexplique, surlonge trop ses effets (ça fait remplissage de pages) et finalement cela sonne "fabriqué", artificiel, c'est parfois agaçant, voire ça gave (un peu comme une abondance de Twix pour rester dans le roman) et franchement dommage car y'avait moyen de faire un petit "Des souris et des hommes" (également cité dans le livre) en mode Bonnie & Clyde. Je passe outre les situations improbables et l'accumulation de poisse qui plombe la vie des personnages, mais bon, pourquoi pas, ce n'est pas ça le plus gênant.

    Bref, désolé d'être un peu sévère, mais encore une fois, y'avait moyen avec plus d'économies de mots et plus de silence, de non-dits, de faire bosser davantage le lecteur et l'emporter. Peut-être pour un second roman ?

    04/10/2016 à 20:33 5

  • Cataract City

    Craig Davidson

    8/10 Une écriture riche, foisonnante, détaillée et visuelle. L'auteur s'attache à beaucoup décrire les corps et à ses douleurs, les peaux...(ce n'est pas étonnant que l'auteur sous un pseudo ait aussi écrit des romans horrifiques) qu'on retrouve aussi chez Stephen King. Les longues scènes dans la forêt au début (que je craignais d'être longue et fastidieuse) sont les plus réussies (celles des courses et combat de chiens sont très bien aussi). Des personnages bien charpentés avec une vraie densité, la relation entre les deux amis est belle, faite de non-dits (dommage que la seule confrontation entre les deux n'en est as vraiment une). Les 50 dernières pages m'ont peut-être moins enthousiasmés, mais c'est un détail. Un sombre roman sur la fatalité.

    23/10/2016 à 20:38 3

  • Chien 51

    Laurent Gaudé

    3/10 Que Laurent Gaudé, auteur que j’affectionne et à qui on doit “Le soleil des Scorta”, “La mort du roi Tsongor”, “Eldorado” et surtout mon préféré “La porte des enfers”, s’essaye au roman policier et à la SF, tout cela avait tout pour me plaire. Je me demandais comment il allait s’en sortir et aborder ce double genre. J’étais intrigué, alléché même.
    288 pages plus tard, c’est la douche glacée.
    Bien plus qu’une déception, ce roman est une très mauvaise surprise. Peut-être que les plus néophytes y trouveront de quoi les satisfaire, mais je doute que les aficionados du polar et de l'anticipation y trouvent vraiment leurs comptes.
    Autant le dire : Gaudé s’est raté. Sur toute la ligne.
    Raté à bâtir une intrigue qui soit vraiment captivante.
    Raté à créer des personnages forts (certains personnages secondaires s’insèrent dans l’intrigue, mais n’apportent pas grand chose). Cela manque d’incarnation, ce qui fait qu’on n’est guère touché par ce qui (leur) arrive. A ce titre, la pseudo romance entre les deux flics est aussi rapide que surfaite.
    Raté même dans ce qui fait d’ordinaire la grande force de l’auteur : l’écriture (les dialogues sont empesés et théâtraux).
    Le style est lourd, sans saveur, et ici le lyrisme qui d'ordinaire caractérise la patte Gaudé sonne faux. La première partie est la description assez longuette (et guère passionnante) de ce nouveau monde. La conduite de l’enquête n’est guère plus enthousiasmante. Gaudé scrute notre monde actuel, ses dérives (ultra concurrence, totalitarisme, soulèvement de la population…), ses enjeux (crise climatique) pour en tirer une dystopie sans guère d’ambition et de souffle malgré une idée séduisante et quelques trouvailles originales. Ses efforts pour créer - avec maladresse - de la tension (la dernière phrase qui clôture chaque chapitre est très lourde) m’ont paru trop voyants et d’une grandiloquence vaine. Tout ça sent le forceps et ça pèse des tonnes. Certains passages (je pense à la scène à l’hôpital avec Zem et Salia après l’agression de cette dernière ou la longue tirade de Zem page 259-262) frisent le ridicule.
    Ce livre manque de tout. D’audace, de force, d’émotion ; tout ce qui doit faire une lecture marquante. C’est à se demander si l’auteur lui-même était convaincu par son histoire. De la première à la dernière page, je ne me suis jamais intéressé par ce que je lisais, tant tout cela m’a semblé scolaire dans la narration, plan-plan, poussif dans le procédé, forcé dans les effets et les intentions.
    Je répète, j’ai beaucoup aimé les opus précédent de l’auteur. Laurent Gaudé a maintes fois prouvé son talent et sa flamboyante capacité à produire le meilleur.
    Avec “Chien 51”, il vient désormais de commettre le pire.

    02/09/2023 à 18:53 3

  • Chiens de la nuit

    Kent Anderson

    5/10 J'ai un peu honte de le dire, mais je n'ai pas terminé ce livre (lu 300 pages environ sur les 600). Je lui mets la moyenne car le style ne m'a pas rebuté et le personnage principal est intéressant. C'est juste que le rythme est assez mou et que les réminiscences du héros sur la guerre du Vietnam a fini par me lasser. L'absence d'intrigue a proprement parler a peut-être été préjudiciable également. Bref, je sais que pour beaucoup ce livre est un must, mais voilà, j'ai tellement d'autres bouquins à lire que je voulais pas me forcer à poursuivre un bouquin qui ne m'emballait pas plus que ça. Mon droit de lecteur non ?

    12/07/2016 à 07:33 1

  • Code 93

    Olivier Norek

    8/10 Le manque d'originalité de l'intrigue (qui demeure accrocheuse néanmoins) et le fait que l'identité de l'assassin ne soit pas une énorme surprise, est largement compensé par le style, sec, nerveux, mais aussi les personnages bien croqués (en très peu de ligne, on imagine très bien, c'est assez fort), une construction solide et un criant réalisme (c'est documenté - expérience oblige - et les dialogues sont excellents) qui démontre que rien ne remplace le vécu (l'auteur est un ex flic). De plus, on nous épargne la love-story mielleuse. Mais le gros plus, c'est qu'au delà du caractère divertissant (ça se lit très très vite), le roman est instructif, on apprend pleins de choses (pas jolies jolies) sur le fonctionnement intra-muros dans la police et la difficulté de rester loyal et clean.

    Dans le genre c'est franchement bon. Cela m'a donné envie de suivre Victor Coste dans un second opus. Direct, je me suis procuré le deuxième roman "Territoires".

    C'est un peu le pendant littéraire du cinéaste Olivier Marchal. Parait que Laurent Guillaume est peu ou prou dans la même veine. Je vais m'en assurer.

    01/06/2016 à 21:02 9

  • Cry Father

    Benjamin Whitmer

    7/10 Moins marquant que l'excellent PIKE, il est toutefois plus dense et plus ambitieux. Plus complaisant aussi par moment. J'ai déploré quelques longueurs.
    C'est un roman très noir, sans concession, assez désespéré même. Heureusement la toute fin laisse filtrer une part d'humanité pour ces personnages torturés.
    En tout cas, ça donne envie de suivre cet auteur pour un troisième opus.

    24/05/2016 à 08:28 5

  • Dans les angles morts

    Elizabeth Brundage

    8/10 Sous de faux airs de roman policier, et même de roman noir psychologique, ELIZABETH BRUNDAGE signe un livre dense et ample, à l’écriture précise et minutieuse, où plusieurs thématiques sont abordés et notamment des phénomènes de société (crise agricole, le féminisme, la vie de couple, les croyances, le poids de l'enfance), mais aussi l’art (la peinture), la philosophie…C’est un roman multiple, d’une terrible humanité. Ou plutôt d’une humanité terrible. Les apparences, la religion, la peur, la prédestination, tellement de choses sont abordés - habilement, sans forcer - que ça en donne le tournis.
    L’auteure n'oublie pas de distiller progressivement et brillamment la noirceur d’une ambiance où les destins comme les nombreux personnages (tous sont suffisamment développés et fouillés dans toute leur ambiguïté) s’assombrissent, et nous rappellent combien les démons - nos démons - dorment en nous-mêmes. Subtilement, par la biais de cette maison (un personnage à part entière) qui semble « choisir ses propriétaires », il est même question de surnaturel, mais c’est très finement suggéré.
    600 pages qui nous enveloppent et pour mieux nous happer, nous piéger, et même nous frustrer. Ne cherchez pas de moralité, la vie est souvent cruelle et injuste. D'une certaine façon, ce roman l'est et c'est pour ça qu'il sonne juste.
    Précédé d’une excellente réputation, celle-ci est fondée : DANS LES ANGLES MORTS (super titre, meilleur que l’original) est en effet un grand roman américain.

    23/08/2020 à 16:55 3

  • Dans les brumes de Capelans

    Olivier Norek

    6/10 En bref, le dernier opus de Norek se lit vite grâce à une écriture toujours nerveuse et des personnages plutôt bien croqués. L’intrigue est tirée par les tifs et prévisible.
    Le personnage de Coste, sous des aspects rustauds demeure un cœur un peu trop grenadine, de quoi ravir les midinettes. Ce flic qui brise le cœur des filles et suscite l’admiration des mecs, rappelle combien l’auteur est un incorrigible cabot. A la longue, c’est un peu risible. Même péché mignon pour les dialogues (la spécialité Norek) qui fait que tout le monde est doté d’une redoutable répartie, mais ça claque bien. Nickel pour une adaptation TV/ciné.
    Petite nouveauté : Norek s’est montré plus descriptif qu’à l’accoutumée.
    Bref, Norek fait le job, mais je ne suis pas certain de renouveler l’expérience si ce dernier ne se renouvelle pas.

    06/09/2022 à 23:22 5

  • Des noeuds d'acier

    Sandrine Collette

    5/10 Pas franchement convaincu par ce "Captivity thriller" (vendu et primé en tant que roman policier, je me demande encore pourquoi), une espèce de "Misery" chez les ploucs (en nettement moins effrayant). Pas franchement en empathie avec le personnage non plus ; personnage auquel je n'ai d'ailleurs pas trop cru. L'auteure n'est pas parvenue à me faire frémir avec ces deux vieux géoliers. La thématique, pourtant intéressante, (l'esclavagisme et la domestication de l'humain et son ensauvagement) n'est pas tellement poussé au final. Pourtant, il aurait été intéressant d'illustrer la perte progressive de repères de raison et une mutation bestiale mais en définitive, la victime n'évolue pas tellement durant ces 18 mois d'enfermement et de maltraitance. Cela tourne un peu en rond et j'ai tourné les pages sans véritablement me défaire de cet ennui poli. La plume, elle, n'est pas désagréable, mais assez anecdotique, rien qui ne marque l'esprit ou la rétine. Après, c'est le premier roman et il date un peu.
    En bref, mon premier Collette, pas le dernier, mais une déception.

    21/01/2023 à 15:01 4

  • Dolorès ou le ventre des chiens

    Alexandre Civico

    6/10 En dépit de l’écriture toujours aiguisée et poétique de son auteur, c’est bien la déception qui prime à la lecture du (bien trop court) roman d’Alexandre Civico.
    Trop court en tout cas pour laisser infuser, croire et ressentir l’intensité de cet affrontement façon “Silence des Agneaux” inversé (en nettement moins sordide) entre ces deux marginaux, ces deux inadaptés de la vie. Dolores, tueuse en série, et révolutionnaire à son corps défendant (j’avoue que je n’ai pas toujours compris ses motivations réelles, si ce n’est le dégoût d’un monde, d’un système capitaliste) et Antoine, son psy cocaïnomane, dont le mal-être n’est guère plus explicite hormis cet absence de sens dans son existence (mais la mélancolie a t-elle besoin d’explication ?).
    A ce titre, leur joutes verbales sous forme de confidences, m’ont paru aussi précipitées qu’un peu trop écrites. Là encore, cette dualité méritait une évolution plus lente, plus progressive pour que je puisse adhérer à ce duel.
    De façon générale, même si les dialogues claquent bien, j’ai trouvé que tous les personnages, principaux comme secondaires, avaient un sacré éloquence et un fichu sens de la répartie. J’y vois là un petit artifice, une gourmandise d’auteur (pour laquelle j’ai pas mal d’indulgence). Je passerais sur le final que je trouve assez expédié.
    En tout cas, c’est bel et bien ce style racé, son phrasé court et imagé, dont la beauté et la force viennent, de temps en temps, vous percuter la rétine qui est son véritable et plus grand atout et qui ont fait qu’en dépit d’une absence totale d’empathie pour tous les protagonistes (hormis peut-être Chloé, bonne pâte mais dont se demande si son seul objectif n’est pas de tromper l’ennui de sa vie bourgeoise en s’entichant du mec torturé), j’ai lu ce livre sans déplaisir, mais sans émotion non plus, tout l'inverse de son précédent ATMORE ALABAMA dont la noirceur lumineuse m’avait piétiné le coeur.
    J’espère qu’Alexandre Civico, brillant styliste, ne m’en voudra pas trop, mais comme toujours, et fidèle à mes principes et au respect que je dois à tout auteur professionnel comme amateur, je me devais d’être le plus sincère possible.

    25/03/2024 à 14:14 2

  • Elle le gibier

    Élisa Vix

    4/10 Le sujet, toujours autant d'actualité, n'est pas sans intérêt (harcèlement moral dans le milieu professionnel, obsession de la performance, déshumanisation....), la charge un poil caricaturale (même si des boites comme ça existent).
    La seconde partie (interrogatoires des collègues, ....) est assez ennuyeuse et ne crée pas davantage d'empathie pour le personnage principal (Chrystal).
    Question écriture, le style est soigné, bien trop propret à mon goût, zéro audace, zéro inventivité formelle (on est loin de la poésie du regretté Joseph Ponthus et son "A La Ligne" dont les envolées lyriques et la prose soulignaient encore plus l'inhumanité de l'environnement professionnel).
    Bref, j'ai lu une rédaction améliorée.
    Pas mauvais en soi, mais largement dispensable.

    06/03/2023 à 22:02 3