Saint-Omer paranoïa

  1. L’ombre de John Michael Shadow

    Karl Keller, lieutenant de police, vit toujours sur le fil du rasoir, aussi son supérieur lui a-t-il intimé l’ordre de suivre une thérapie auprès d’une psychiatre. Mais cette dernière disparaît subitement. Des cadavres commencent à fleurir aux alentours de Saint-Omer. Et que dire de cette adolescente qui dit voir dans des rêves les victimes succomber ?

    Après Dans les brumes de Saint-Omer, Bénédicte Boullet poursuit sa série chez Ravet-Anceau consacrée au policier Keller. Sa plume est efficace, les personnages sont rendus avec crédibilité, et les trois personnes citées en début d’ouvrage, un policier et deux docteurs, accréditent cette vraisemblance. Dans ses actes, John Michael Shadow constitue un tueur en série particulièrement machiavélique, expert en informatique, prêt à toutes les abjections, et poussé à accomplir une œuvre de destruction aux accents à la fois artistiques et hautement symboliques. L’ensemble se lit à la fois facilement et rapidement, et on en regrette d’autant certains clichés émaillant le récit, en particulier quant à la personnalité de l’assassin, qui est finalement une combinaison de divers tueurs en série de fiction, avec à la clef un fort sentiment de déjà lu. Ce qui est encore plus dommage, c’est la manière trop rapide dont Bénédicte Boullet évacue l’idée de la jeune fille aux songes, à la page soixante-huit. En deux lignes, le mystère s’évapore instantanément, avortant un thème qui était pourtant prometteur.

    Un livre s’apparente parfois à une partie de poker menteur, où le bluff permet de maintenir un suspense appréciable. Dans le cas présent, en plus de quelques poncifs, Bénédicte Boullet abat trop vite certaines de ses cartes. C’est d’autant plus regrettable que son roman était endiablé et prenant.

    /5