Vue sur crime

  1. Fenêtre sur cour

    Récemment sorti de prison, le jeune Pascal Sirel a été victime de la malchance. Voleur, il a été arrêté alors qu’il cambriolait un appartement où se trouvait le corps d’une femme décapitée. En partie accusé, Pascal tente de se réinsérer dans la société, et on lui a confié un travail de commis boucher dans une petite surface. Mais au domicile qu’il occupe, il découvre l’étrange comportement d’un artiste, et lui prête rapidement des desseins meurtriers.

    Spécialiste de la littérature noire pour la jeunesse, Sarah Cohen-Scali s’est particulièrement illustrée grâce à des recueils de nouvelles, sombres et efficaces, comme Mauvais sangs ou Mauvais délires. Même lorsque sa plume s’attaque à des récits plus longs, la magie opère. L’histoire est dense, avec un personnage principal particulièrement travaillé : il ne cesse de repenser au sort qui s’est acharné sur lui, peine à trouver sa place hors des murs de la prison, et demeure marqué par sa détention. Il va d’ailleurs retrouver une partie de son moral aux côtés de son supérieur, Gabriel Castaigne, un homosexuel en pleine crise amoureuse.
    L’intrigue semble de prime abord très classique, puisque le sujet a déjà été maintes fois traité, en littérature comme au cinéma. Cependant, Sarah Cohen-Scali a su magnifier le scénario de son roman grâce à une écriture sèche et nerveuse, une concision qui sert ses propos, et surtout un rebondissement très malin vers la fin du livre. Le suspense est soutenu, les protagonistes crédibles, et l’on ne peut que ressentir de l’empathie, voire de la sympathie, pour Pascal. On trouve également de belles réflexions quant à l’homophobie et les difficultés de réadaptation pour les anciens délinquants.

    Destiné en priorité aux jeunes, mais largement accessibles aux adultes, ce roman captive autant qu’il divertit. Sarah Cohen-Scali compte parmi les écrivains les plus adroits pour ensorceler les jeunes et créer des univers obscurs où il fait si bon se perdre.

    /5