Anesthésie générale

(Pain Killers)

  1. Au plus près du Mal

    Manny Rupert, un ancien policier, est engagé par Zell pour approcher un prisonnier de San Quentin. Sous couvert de mener des ateliers de réflexion sur la drogue avec les détenus, il va devoir vérifier si ce vieillard est bien, comme il le prétend, Josef Mengele.

    Après A poil en civil, on retrouve le personnage de Manny Rupert. Et surtout le style de Jerry Stahl. Parce que, si vous appréciez le style décalé voire complètement déjanté, vous allez vous régaler. D’ailleurs, le premier chapitre donne le ton : celui qui vient embrigader Manny est un vieillard muni d’un déambulateur, à l’humour corrosif et au langage à double sens. Le reste de l’ouvrage est du même acabit : sacrément caustique. Dans les dialogues, les scènes, les descriptions psychologiques, on sent parfaitement que Jerry Stahl s’est fait plaisir. Entre humour typiquement juif et situations complètement baroques, le lecteur aura souvent le rire aux lèvres, voire les zygomatiques en action. Finalement, ce que l’on pourra reprocher principalement à ce roman, au-delà de quelques cocasses bavardages et autres joyeuses digressions, c’est le mélange des genres. Etait-il possible d’évoquer Josef Mengele dans une histoire parfois aussi comique ? N’y avait-il pas un risque de mauvais goût ? Si, indéniablement. Le risque était là. Mais l’auteur, en habile équilibriste, sorte de Donald Westlake en version judaïque, sait jouer de ce contraste pour mieux déboussoler le lecteur. Parce que l’humour, ici, permet justement de dépasser l’horreur des thèmes abordés.

    Entre esclandres drolatiques, scènes complètement barrées et délires littéraires, Jerry Stahl a su installer une histoire originale et très agréable à suivre. Malgré des longueurs pas toujours utiles et une fusion du noir et du rocambolesque qui ne plaira pas à tout le monde, l’écrivain signe un ouvrage qui marquera certainement, à défaut de vouloir absolument séduire.

    /5