Masses critiques

  1. L'amer à boire

    René Joffre est restaurateur, spécialisé dans les produits de la mer. Ayant eu le malheur de leur acheter des produits sous le manteau, il est depuis victime de chantage et de menaces incessantes des Banneck, un père et deux fils ayant fait de la pêche clandestine leur gagne-pain.
    Lorsque l'un des fils l'appelle en urgence en pleine nuit pour lui annoncer le naufrage du bateau familial, René pense être définitivement débarassé de ces enquiquineurs.
    Malgré la catastrophe des Banneck, René et son ami de toujours, Marc, ne sont pas au bout de leurs peines, loin de là.

    Après Rade amère, premier roman fort remarqué, Ronan Gouézec est de retour au Rouergue avec ce second opus. Encore un roman maritime ? ne peut-on s’empêcher de penser en commençant à parcourir la quatrième de couverture avec un peu d’appréhension. L’auteur ne va-t-il pas par trop se répéter ? Rapidement, les craintes s’avèrent en grande partie infondées et les seules similitudes concernent le quotidien des gens de mer, décrit avec précision mais non sans une certaine poésie par le Finistérien. La couleur ne change pas : bleu pétrole, pour ne pas dire noir. La tension est présente dès le départ avec cette sombre histoire de chantage et on imagine bien que tout ça ne va pas nécessairement bien se terminer. On est cependant loin du compte tant l’auteur n’hésite pas à malmener ses personnages. Peut-être un peu trop d’ailleurs. Autant de catastrophes qui tombent sur les mêmes personnes en si peu de temps, ça en devient difficilement plausible. Au milieu maritime déjà présent dans Rade amère, Ronan Gouézec ajoute quelques ingrédients, plutôt bien sentis. Une histoire d’amour pas banale et plutôt bien amenée entre un éternel célibataire en surpoids et la fille de son meilleur ami. L’auteur questionne aussi, un peu à la façon d’un Antoine Chainas, le rapport au corps et au médical à travers la thématique de l’obésité. Jusqu’où le corps médical peut-il s’introduire dans votre quotidien si c’est « pour votre bien » ? Jusqu’où peut-on bien vivre son obésité sans conséquences pour sa santé ? Tout cela est une question d’équilibre que Marc ne prend pas à la légère mais qui le dépasse quelque peu malgré tout.

    Traitant de différents sujets, Masses critiques est un roman noir bien écrit mais qui peine à convaincre totalement, en partie en raison de son scénario un brin invraisemblable. Pour le reste, certaines scènes – de plongées nocturnes notamment – resteront en mémoire.

    /5