Le Quatrième Mur

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  • 10/10 Sorj Chalandon, ancien grand reporter à Libération, s'est trouvé dans les camps de Sabra et Chatila au lendemain des massacres, en septembre 1982.
    Comme nombre de ses confrères, il fut profondément et durablement choqué.
    Et il mit de longues années avant de reparler de ce tragique et douloureux évènement, plus de trente ans après les faits, et sous la forme d'un roman.
    Pas d'autobiographie mais un personnage central, Georges (qui sonne un peu comme Sorj) qui ressemble beaucoup à l'auteur.
    Le contexte du départ pour le Liban est très original : Georges s'engage à poursuivre l'idée folle de son ami grec mourant Samuel de jouer l'Antigone d'Anouilh à Beyrouth, en pleine guerre et en faisant jouer toutes les communautés dans la pièce (Druzes, Sunnites, Chiites, Chaldéens, Maronites, Catholique arménien). Une véritable utopie, magnifique mais qui semble totalement impossible.
    Georges quitte Paris, sa femme et sa fille pour accomplir sa promesse.
    Sur place il découvre l'horreur de la guerre, dès l'aéroport de Beyrouth. Partout, la guerre civile est partout. Les communautés s'entredéchirent, dans le sang, les balles, les bombardements, les massacres.
    L'émotion, la tension sont partout dans ce texte. On vibre avec Georges, on partage ses espoirs, ses doutes, sa détresse. On veut que la pièce se joue, on croise les doigts, on épie les réactions des différentes communautés, on espère...
    Jusqu'à ces jours de septembre 1982, où l'horreur de cette guerre éclate à la face de l'Occident, avec ces images retransmises dans les journaux télévisés des massacres de Sabra et Chatila, deux camps de réfugiés palestiniens en banlieue de Beyrouth.
    Et l'on pleure avec Georges.
    Un roman bouleversant (vraiment), un texte qu'on ne peut oublier et qui reste longtemps en mémoire.
    Un roman qui nous informe, qui nous apprend, qui nous explique aussi, de la dictature des colonels en Grèce via le personnage de Samuel à la guerre civile libanaise.
    Et on remercie Sorj Chalandon d'avoir su trouver les mots pour traduire à la fois son émotion et ce que fut cette guerre civile libanaise, trop méconnue ou oubliée de nos jours.
    Un très grand livre.

    03/01/2019 à 20:54 LeJugeW (1776 votes, 7.3/10 de moyenne) 7