Jeune journaliste stagiaire au Courrier du Sud-Ouest, Skander Corsaro compte réaliser un article sur l’abbaye de Morlan. Mais, une fois les quelques interlocuteurs interviewés sur place, l’oubli du capuchon de son appareil photo l’oblige à rebrousser chemin et, malencontreusement, saisir un dialogue entre l’architecte et le conservateur où il est question de l’abbé Soeuil. Qui est ce mystérieux abbé ainsi évoqué ? Pour Skander, c’est le début d’une enquête riche, qui va le mener à rouvrir des plaies ouvertes il y a bien longtemps.
Il s’agit du premier ouvrage de François-Henri Soulié, et dont le second tome, Un Futur plus que parfait, est sorti en mars dernier. Ce qui séduit d’entrée de jeu, c’est le style de l’auteur. Il est fourmillement. De répliques drôles et toujours de bon aloi. De justes réflexions quant à l’être humain et la société. De mises en scène de situations parfois rocambolesques, où l’absurde le dispute au croustillant. De délicieux petits plaisirs littéraires, gorgés de malice et d’esprit, certes souvent fugaces, mais qui débouchent fréquemment sur de nouvelles saynètes savoureuses. On en vient volontiers à reprendre certains passages, moins pour ce qu’ils apportent à l’enquête en tant de telle, que pour l’allégresse qu’il procure au lecteur. Les divers personnages sont un régal. Skander, moitié français moitié – lui-même le confesse – on ne sait pas trop quoi, pris entre la culture européenne et les lustres orientaux. Léo Orson, le peintre paralysé qui ne peut se déplacer qu’à l’aide d’un fauteuil hightech, à l’altruisme immense. Max, le tenant du bistrot. Tonio, le fidèle ami de Skander, anarchiste, homosexuel, grand lanceur de pépites philosophiques, et toujours prêt à aider son ami d’enfance. Berland, le directeur du journal, d’une absolue humanité pour son stagiaire. Arthur Schoenberger, dit Chon-Chon, bouquiniste plein de ressources et survivant d’Auschwitz. Sans compter Sandra, la spectrale fille de Léo et pour laquelle Skander a immédiatement ressenti une inclination onirique, quitte à déboussoler ses rêves et lui faire subir des hallucinations. Le récit purement policier va également mener notre limier d’un mystère à un autre, entre des événements ayant eu lieu peu de temps avant la Révolution française, la Seconde Guerre mondiale, et des complots très contemporains, très politiques, et très sordides. C’est aussi cela l’un des grandes qualités littéraires et scénaristiques de déploie François-Henri Soulié : souffler le chaud et le froid, le réjoui et le dramatique, le sautillant et le monstrueux. Parce qu’une honorable vieille dame, recluse dans une maison de retraite aux forts accents catholiques, malgré ses pertes de repères historiques au point de confondre passé et présent, constituera l’un des détonateurs déposés sur une immense charge explosive qui vaporisera de nombreux personnages. Si la salve des premiers chapitres laisse penser que l’ensemble du récit sera allègre, voire gentiment futile, la suite des événements prouvera le contraire, exposant aux yeux terrifiés des protagonistes des pages monstrueuses de l’histoire française. Cette cohabitation du léger et du terrible aurait pu mener à une fusion, voire une confusion des genres, un brouet infâme, au risque de perdre le lecteur, ou lui faire penser que François-Henri Soulié n’a jamais su choisir son registre. Ici, il n’en est rien. Il vient au contraire souligner l’intelligence d’un auteur qui a su apporter, avec correction et justesse, ces deux éléments sans jamais les mélanger ou les noyer l’un dans l’autre pour les neutraliser.
Un roman vif, érudit et passionnant, ayant amplement mérité le Prix du premier roman policier du festival de Beaune de 2016. Et cet enchevêtrement des diverses époques historiques évoquées, ici imbriquées dans cette chasse au trésor, démontre la pertinence du titre choisi : Il n’y a pas de passé simple.
Jeune journaliste stagiaire au Courrier du Sud-Ouest, Skander Corsaro compte réaliser un article sur l’abbaye de Morlan. Mais, une fois les quelques interlocuteurs interviewés sur place, l’oubli du capuchon de son appareil photo l’oblige à rebrousser chemin et, malencontreusement, saisir un dialogue entre l’architecte et le conservateur où il est question de l’abbé Soeuil. Qui est ce mystérieux abbé ainsi évoqué ? Pour Skander, c’est le début d’une enquête riche, qui va le mener à rouvrir des plaies ouvertes il y a bien longtemps.
Il s’agit du premier ouvrage de François-Henri Soulié, et dont le second tome, Un Futur plus que parfait, est sorti en mars dernier. Ce qui séduit d’entrée de jeu, c’est le style de l’auteur. Il est fourmillement. De répliques drôles et toujours de bon aloi. De justes réflexions quant à l’être humain et la société. De mises en scène de situations parfois rocambolesques, où l’absurde le dispute au croustillant. De délicieux petits plaisirs littéraires, gorgés de malice et d’esprit, certes souvent fugaces, mais qui débouchent fréquemment sur de nouvelles saynètes savoureuses. On en vient volontiers à reprendre certains passages, moins pour ce qu’ils apportent à l’enquête en tant de telle, que pour l’allégresse qu’il procure au lecteur. Les divers personnages sont un régal. Skander, moitié français moitié – lui-même le confesse – on ne sait pas trop quoi, pris entre la culture européenne et les lustres orientaux. Léo Orson, le peintre paralysé qui ne peut se déplacer qu’à l’aide d’un fauteuil hightech, à l’altruisme immense. Max, le tenant du bistrot. Tonio, le fidèle ami de Skander, anarchiste, homosexuel, grand lanceur de pépites philosophiques, et toujours prêt à aider son ami d’enfance. Berland, le directeur du journal, d’une absolue humanité pour son stagiaire. Arthur Schoenberger, dit Chon-Chon, bouquiniste plein de ressources et survivant d’Auschwitz. Sans compter Sandra, la spectrale fille de Léo et pour laquelle Skander a immédiatement ressenti une inclination onirique, quitte à déboussoler ses rêves et lui faire subir des hallucinations. Le récit purement policier va également mener notre limier d’un mystère à un autre, entre des événements ayant eu lieu peu de temps avant la Révolution française, la Seconde Guerre mondiale, et des complots très contemporains, très politiques, et très sordides. C’est aussi cela l’un des grandes qualités littéraires et scénaristiques de déploie François-Henri Soulié : souffler le chaud et le froid, le réjoui et le dramatique, le sautillant et le monstrueux. Parce qu’une honorable vieille dame, recluse dans une maison de retraite aux forts accents catholiques, malgré ses pertes de repères historiques au point de confondre passé et présent, constituera l’un des détonateurs déposés sur une immense charge explosive qui vaporisera de nombreux personnages. Si la salve des premiers chapitres laisse penser que l’ensemble du récit sera allègre, voire gentiment futile, la suite des événements prouvera le contraire, exposant aux yeux terrifiés des protagonistes des pages monstrueuses de l’histoire française. Cette cohabitation du léger et du terrible aurait pu mener à une fusion, voire une confusion des genres, un brouet infâme, au risque de perdre le lecteur, ou lui faire penser que François-Henri Soulié n’a jamais su choisir son registre. Ici, il n’en est rien. Il vient au contraire souligner l’intelligence d’un auteur qui a su apporter, avec correction et justesse, ces deux éléments sans jamais les mélanger ou les noyer l’un dans l’autre pour les neutraliser.
Un roman vif, érudit et passionnant, ayant amplement mérité le Prix du premier roman policier du festival de Beaune de 2016. Et cet enchevêtrement des diverses époques historiques évoquées, ici imbriquées dans cette chasse au trésor, démontre la pertinence du titre choisi : Il n’y a pas de passé simple.