athanagor Modérateur

287 votes

  • Un Animal sauvage

    Joël Dicker

    9/10 Si tu lis mes avis (force à toi !), tu peux facilement lister les rares écrivains dont je ne loupe aucune sortie d'un seul de leurs livres. Tu sais donc que Joël Dicker en fait partie. Et cette fois-ci encore, je n'ai pas été déçu.

    Pour une fois, on ne parle pas de meurtre sanglant ou de situation sordide d'une noirceur troublante. J'ai lu ici un roman à suspense, avec des mystères, des secrets, des non-dits, de l'amour, de l'amitié, des trahisons, des réconciliations ; la vraie vie en somme.

    Joël Dicker joue avec le temps. Il imbrique, il rythme, il ralentit. Il joue avec juste 7 minutes, qu'il étire pour mieux nous les faire vivre.
    Ce sont ces 7 minutes qui sont la colonne vertébrale de cette histoire. De ces histoires, plutôt. A partir d'un seul braquage qui doit donc durer 7 minutes pour réussir, Joël Dicker nous place au cœur d'une histoire courte et passionnante à multiples étages comme il en a pris l'habitude.
    Le temps se mêle et se démêle sans nous faire perdre le fil de l'histoire principale. Toutes les situations se répondent. C'est remarquable ! C'est ultra addictif alors qu'au final, on pourrait penser qu'il ne se passe rien. Sauf que !
    Sauf que Joël Dicker répond directement aux questions qu'il VA poser. Il joue avec le temps, je te le dis ; notre temps de lecteur.

    On passe de la légèreté à l'angoisse sans s'en rendre compte. C'est vraiment sauvage et les humains sont ici décrits à la perfection : personne n'est tout blanc, personne n'est tout noir. Les personnages secondaires impactent les premiers rôles, et inversement.
    2 couples au centre. L'un admire l'autre. L'autre envie l'un. Les vies se croisent. Les apparences explosent. Chaque événement à son importance. Chaque micro détail peut ébranler l'édifice fragile d'une vie bien rangée, et on ne les voit arriver qu'après.

    Ce roman est court par rapport à ses précédents, et il se lit très très vite.
    L'action n'est pas présente à chaque page, mais les excellents dialogues donnent un dynamisme assez troublant : ils permettent de se rendre compte que ce ne sont pas les personnages qui bougent, c'est l'environnement dans lequel on croyait jusqu'alors qu'ils évoluaient.
    On est tour à tour dans la tête des personnages, ou un objet dans la pièce ; on est le vrai spectateur de cette histoire qui nous happe.

    J'ai tourné les pages sans pouvoir m'arrêter et ça faisait longtemps que je n'avais pas pris autant de plaisir à me plonger dans une histoire.
    Les ayatollah de la littérature classique, qui aiment détester le succès populaire, ne s'y retrouveront pas. Par principe, et parce que Dicker nous a fait du Dicker, et c'est tant pis pour eux. Ceux qui cherchent les bonnes histoires parfaitement racontées en auront pour leur rythme cardiaque. Tant mieux pour eux.

    C'est un sauvage 9/10 dans mon échelle de goût.
    Rendez-vous à la prochaine histoire !

    12/03/2024 à 01:26 6

  • La Femme au dragon rouge

    José Rodrigues dos Santos

    8/10 Après un très flippant Furie divine sur l'endoctrinement des islamistes radicaux terroristes, voilà une histoire encore plus flippante sur le parti communiste chinois.

    Sur la base de faits réels, la construction en 2 temps non imbriqués est encore une fois très bien pensée.
    D'un côté Tomás Noronha mène son enquête (pour sauver une nouvelle fois sa femme qui, décidément, commence à être le point de départ de pas mal de soucis pour lui, après ses lubies sur le circuit animal et alimentaire dans Âmes animales !) en temps réel.
    De l'autre Madina, une chinoise Ouïghoure dont on va vivre plusieurs années de son existence, de sa prime-jeunesse à sa vie de femme, au rythme de son violent apprentissage de la "culture" communiste.

    Si les passages avec Tomás restent encore (parfois) lourds à lire, trop stéréotypés, avec des dialogues aux relances inutiles, JR Dos Santos excelle dans la partie Témoignage, avec le ressenti de Madina résolument atroce et inhumain. Tout comme l'auteur l'avait fait avec les magistrales biographie de Gulbenkian et Vie du magicien dans le camp de concentration de Birkenau, on vit ici la puissance du parti communiste chinois, depuis l'intérieur et les environs du système.
    Et on voit parfaitement où veut en arriver le Parti (je ne dis pas "la Chine" car ce pays est aussi très bien décrit comme une victime de ses dirigeants de l'ombre) au niveau international.
    C'est très inquiétant et comme en a l'habitude maintenant JR Dos Santos, il utilise une approche romanesque (son visage d'écrivain, donc) pour sublimer le réel et mieux le dénoncer (son métier de journaliste).

    Technologie, idéologie, politique, social, sociétal, commercial, religieux, familial, amical, medical, scientifique, militaire, et même l'Histoire, tout y passe !
    Toute la tactique communiste radicale est épluchée pour mieux la dénoncer. Et c'est surpuissant. Il faut bien ça pour tenter de faire changer l'inéluctable.
    L'inéluctable...

    A lire absolument !
    Comme un reportage, comme un thriller, comme une dénonciation, comme un cri d'alerte, comme un manifeste, mais avant tout pour se rendre compte que le mal est déjà parmi nous et qu'il faut le combattre encore plus forcément que le laisse supposer leur adoucissement, au même titre que le radicalisme sous toutes ses formes.
    J'aurais même tendance à penser que c'est un mal encore plus pernicieux que les nazis en leur temps ou islamistes actuellement car personne ne sait réellement qui dirige "le Parti", même s'ils ont un "chef" (qui, après l'avoir été, peut très bien être lui-même enfermé dans les camps qu'ils lui-même contribué à faire prospérer)
    Comment discuter avec une entité inconnue, faite de soldats (même les civiles) qui ne savent pas qui les manipulent mais le font avec convictions, pour leur propre survie ?

    Un 10/10 pour le fond, un 7/10 pour la forme (comme d'habitude, malheureusement) donc au global, un 8,5/10 pour mettre en lumière le travail remarquable sur ce fléau qui n'attend rien d'autre que son heure pour nous envahir, même s'il est peut-être déjà trop tard. Et comme toute religion radicale (oui, oui), elle a tout son temps pour y arriver, quitte à attendre quelques générations de plus. Ce n'est pas un dirigeant qui veut le pouvoir durant sa vie, c'est une idéologie qui dépasse les corps.

    Je dédie cet avis à tous ceux qui pensent qu'en France, nous vivons dans une dictature où rien ne peut être dit...
    Syndrome Dunning-Kruger, toussa toussa...

    16/08/2023 à 19:18 2

  • Les Fantômes de Kiev

    Cédric Bannel

    9/10 2nd opus de la série mettant en scène Edgar van Scana, cette histoire est imprégnée de l'actualité autour de la guerre entre la Russie et l'Ukraine.
    C'est technique juste comme il faut pour comprendre non seulement que le sujet est complexe mais à la fois aussi pour bien se rendre compte qu'on est très très loin de tout connaître en matiere d'espionnage.
    (D'ailleurs, il est à un moment donné que la France était parmi les meilleurs en espionnage, devant même les services secrets israéliens sauf qu'au contraire de ces derniers, nous ne communiquons pas sur nos victoires.)

    La France se retrouve en bonne place (pour ne pas dire complètement piégée) au sein de ce conflit et doit donc se sortir de cette ornière internationale. S'il s'avère que c'est vrai - et je n'en doute que très peu - c'est un truc dingue que nos dirigeants ont validé en croyant bien agir !
    Le Kremlin en veut à la France et va le lui faire payer. On découvre l'avance technologique de certains pays européens sur la Russie qui se défend ou attaque, elle, avec un patriotisme tout aussi puissant et dévastateur que nos armes de pointe.
    D'un agent secret infiltré tué à un complot plus que menaçant avançant masqué, on découvre que le réseau russe n'est pas si tentaculaire (donc d'autant plus plausible), car on sait d'où tout part.
    Il y a plusieurs histoires dans l'histoire et tout s'imbrique de manière "classique". Ce qui l'est moins, c'est ce qu'on y apprend, c'est le fond des histoires. C'est passionnant et flippant comme tout roman d'espionnage qui se respecte.
    Énorme coup de coeur pour les dizaines de pages des chapitres 70 et 77 de la partie 2, qui ne font pas avancer l'intrigue mais décrivent par le détail les vies ukrainiennes dans le premier et russes dans le 2nd, visuellement et quotidiennement ! Effroyable ! Glaçant !

    Cet Edgar est un James Bond des temps modernes ; c'est un plaisir de le voir manœuvrer loin de ses bases, toujours à l'aise avec ses techniques de la DGSE bien éprouvées. Il ne semble pas si infaillible que ça, ce qui pourrait donner une ou plusieurs suites aux aventures "légendaires" de ce "héros". Tout comme James Bond, il a de la chance. En tous cas, il sait la provoquer.

    Cédric Bannel m'avait déjà bluffé sur sa parfaite connaissance de l'Afghanistan. Il continue à me faire découvrir avec la même force d'écriture l'espionnage en son cœur, en Russie et Ukraine cette fois-ci.
    S'ils cherchent toujours quelqu'un pour prendre la suite du bureau des légendes, cet auteur me parait être l'homme ideal !

    Un secret 9/10 dans mon échelle de goût d'espion en herbe !

    09/08/2023 à 17:46 6

  • La Faille

    Franck Thilliez

    9/10 Un incip in media res comme je les aime !
    Un pré-générique de folie ! Une planque, une course poursuite, des fêlures, on se demande juste si on va être en apnée comme ca jusqu'au bout !
    Et on respire quand, nous, alors ?? Et bien c'est là toute l'intrigue.
    Merci encore Franck Thilliez, c'est moche ce que tu fais subir à tes personnages et tes lecteurs !

    Si ça demarre aussi vite, aussi intensément, c'est pour trancher encore plus avec le sujet de fond de ce titre : la mort. Celle qu'on touche du doigt tout juste après la vie ; limite l'entre-deux. Tout y est donc plus tranquille, plus figé, plus définitif. Enfin... tout devrait l'être, car avec Franck Thilliez, on court même avec la mort.
    Sous de faux-airs des films Destination finale où la mort veut rattraper ceux qui tentent de lui échapper, ce titre fait référence à l'art, à la science, aux neurosciences, à la psychiatrie, aux cerveaux, aux croyances, à la mythologie, et le tout de manière tres réaliste comme à chaque fois, et toujours de manière chirurgicale, propre et nette.

    Toujours sans pitié avec ses personnages auxquels on s'attache depuis les 12 tomes précédents de cette saga, j'ai trouvé le rôle de Lucie plus en retrait par rapport à celui de Sharko. Ce n'est plus tant un binôme dans cet opus, c'est un couple de flics. Peut-être que Lucie aura sa propre enquête d'ici peu car là, je le sens mal pour elle si elle ne devient que la mère, l'épouse et la coéquipière flic d'un autre flic tête brûlée. Même si certaines scènes montrent heureusement qu'ils restent les enfants-de-papier chéris de mon auteur préféré.

    Le premier tiers du livre installe lentement mais sûrement le thème des expériences de mort imminente (EMI, pour les intimes) mais impossible de s'ennuyer tellement tout s'enchaîne rapidement. Les 2 tiers finaux creusent le sujet de manière ultra-efficace jusqu'au dénouement final d'autant plus dingue qu'il est étayé de vraies découvertes qui vont nous porter dans les prochaines années vers des questions humaines et éthiques aussi fondamentales que celles de l'intelligence artificielle. Le cerveau et l'intelligence artificielle vont bien nous occuper, aussi, en attendant, divertissons-nous avec un Thilliez qui nous permet d'encore espérer que ce monde restera imaginaire.

    Sur mon échelle de goût, La faille est bien installée sur l'échelon d'un 9/10 sur lequel beaucoup d'autres titres de Franck Thilliez sont déjà bien positionnés.

    25/07/2023 à 19:22 5

  • Tous les membres de ma famille ont déjà tué quelqu'un

    Benjamin Stevenson

    7/10 Tous les codes du roman policier sont là et respectés. Avec une narration humoristique qui détonne.
    L'auteur a respecté son deal de départ : jouer franc-jeu.
    Il parle très souvent au lecteur que nous sommes et j'ai pu y retrouver du Moerell et de l'Edika (référence de fan de Fluide Glacial, déso) dans cette manière d'écrire ; et ca fait du bien. Pour la référence citée sur la 4e de couverture avec la série Netflix dans laquelle joue Daniel Craig (à couteaux tirés), je la trouve très juste, même si le rythme n'est pas aussi enlevé que son cousin télévisuel.

    On retouve les caractéristiques d'un Whodunit, un bon roman à énigmes et à tiroirs.
    L'histoire ? Je ne vais pas la décrire car le titre est aussi explicite que la BD intitulée "C'est le jardinier qui a fait le coup". On se retrouve comme dans un bon Colombo sous acide où tout le monde sait qui a tué, et on va donc se focaliser uniquement sur le "comment et pourquoi". Mais avec la maniere en plus, ce qui fera la différence.

    Je me rends compte que jamais je n'ai fait autant de références à d'autres oeuvres pour tenter de décrire une de mes lectures. Comme si je voulais à tout prix faire entrer ce titre dans une case. Alors que peut-être qu'il a, à lui seul, une seule case ! Son originalité est son ton unique. Je m'en souviendrai comme tel. En tous cas, plus que son histoire. Et je pense que c'est justement ce qui était recherché. En ça, il est reussi !

    Rien à ajouter, si ce n'est la position de ce drôle de livre sur mon échelle de goût : un bon 7/10 sur l'échelle du frais et de l'original.

    21/07/2023 à 16:09 6

  • L'Extraordinaire Voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea

    Romain Puértolas

    9/10 Fluide, simple, efficace et tendre. Au départ, une idée surréaliste basique d'un indien dont on pourrait croire qu'il n'a pas de chance, et tout s'enchaîne à un rythme soutenu mais parfait pour ce qui devait durer 10 pages : l'armoire dans laquelle notre héros se cache bouge, donc il dit "hohé ! Il y a quelqu'un dedans". Et hop ! Les monteurs Ikea ouvrent le meuble, le voit, et tout le monde se marre de cette situation cocasse et puis voilà.
    Mais non, l'idée de génie de cet excellent feel-good est de poursuivre dans la loufoquerie, à chaque étape de son voyage, en arrivant à le rendre réaliste ! Car oui, j'y ai cru ! Je l'ai voulu et j'y ai pris du plaisir.

    30/04/2023 à 10:33 5

  • La Boîte à magie

    Henrik Fexeus, Camilla Läckberg

    8/10 Mon premier Camilla Läckberg. J'attendais une nouveauté qui ne faisait pas partie d'une de ses sagas. J'ai de la chance, c'en est une mais c'est le 1er tome !
    Et j'ai de la chance : les 2 héros torturés de TOC et autres obsessions sont très intéressants. Donc je serai là pour le 2.

    L'écriture est on ne peut plus agréable car elle met dans l'ambiance avec une alternance redoutable entre chapitres lents et descriptifs pour des scènes de vie banales mais importantes pour comprendre les caractères des une et des autres avec des chapitres vifs et accrocheurs sur l'enquête.
    L'enquête avance finalement tous les 3 ou 4 chapitres car entre temps, on découvre surtout la vie (ou la vision) d'un personnage. Ça donne donc ce faux rythme assez agréable quoique parfois un tout petit peu trop plat ; notamment avec des scènes un peu bateaux entre les personnages qui se cherchent d'un point de vue amical-voire-plus-si-affinités.

    L'enquête tourne autour de la magie, un domaine déjà pas mal traité mais ici, ce qui m'a le plus intéressé, c'est surtout que Vincent est mentaliste. Et là où c'est bien fait, c'est qu'on comprend bien que le mentalisme est tout sauf de la magie. C'est de l'observation. J'ai vraiment apprécié cette manière de driver les portraits et les recherches, même si comme souvent, c'est presque trop peu utilisé.

    Un magique 8/10 dans mon échelle de goût. Vivement la suite car il y a vraiment matière !

    12/08/2022 à 16:42 5

  • L'Espion qui m'aimait

    Ian Fleming

    6/10 Que serait mon été sans lire un James Bond ? Réponse : un été sans lire un James Bond.

    Voici donc mon ressenti sur ce nouvel opus - le 9e dans l'ordre de parution et le 15e dans mon ordre personnel de lecture - dont la traduction du titre en français est extrêmement précise, pointue, juste, voire parfaitement littérale car l'original imaginé par Ian Fleming est "The spy who loved me".
    Et comme tout bon franchouillard qui se respecte le sait :
    The spy who loved = Motel
    Me = 007
    I'm bilingual. French bilingual.

    Quant au fond - dont j'espère que le traducteur a eu la présence d'esprit de le faire relire à un natif car manifestement, il n'a pas eu la moyenne au TOEIC du premier coup - il est aussi éloigné du registre habituel de l'agent secret que le titre français l'est de sa VO.
    Car ici, même la narration est nouvelle : en effet, tout est écrit comme un journal intime, à la première personne du... féminin !?
    On est alors en droit de se poser la question : "Ian Fleming était-il finalement, par un éclair de lucidité quant à la trop forte mysoginie dont il a affublé son héros dans les opus précédents, un des instigateurs, un des déclencheurs très en avance du mouvement MeToo ?"

    Je ne vais pas répondre directement à cette question mais plutôt vous faire jouer à un petit jeu de piste avec 2 tout tout petits et très très discrets indices qui devraient tous nous mettre sur la voie.
    --> 1e indice : Vivienne - c'est le nom de l'héroïne de cet opus - se regarde dans une glace après s'être fait, sans consentement aucun, pincer les fesses jusqu'à en garder la trace des doigts. Elle rougit de plaisir en se disant que très certainement elle doit être amoureuse de celui qui vient de l'agresser.........
    --> 2e indice. Attention, il pourra peut-être être considéré comme un peu trop subtile aux yeux d'un lecteur non attentif. Je préfère prévenir car j'abuse peut-être dans ma compréhension de ce qui est dit à demi-mot. Il est écrit noir sur blanc, toujours sous forme de pensée de notre chère Viv' (son surnom) juste après avoir fauté avec l'ami James : "Toutes les femmes aiment être un peu violées. Elles aiment être prises. C'était sa douce brutalité à l'égard de mon corps meurtri qui avait rendu sa façon de me faire l'amour si merveilleuse, si bouleversante."

    Émouvant, hein ? Raaah punaise, avec toutes ces émotions, je reprendrai bien un bon verre de Martini, moi. Si seulement une femelle pouvait me le servir, là, maintenant, en hommage à ce temps béni où nous les Alpha, règnions sur le monde.

    Bref.

    Revenons à nos beauf' heu, je voulais dire nos moutons. Dans ce Motel 007, on ne trouvera pas trace de James Bond avant la moitié du livre et surtout, on découvre notre célèbre espion par le biais d'un intermédiaire, avec une vision d'un point de vue féminin. Même si tout est relatif comme expliqué plus haut.
    Et dans un sens, en 2022, on se dit que cette beaufitude va nettement mieux à OSS "Dujardin" 117 car lui au moins, c'est pour faire rire que le trait est aussi grossier.

    Ainsi, au final, pas le meilleur James Bond, car pas vraiment d'espionnage en tant que telle ici, ni réelles actions d'envergure, mais ça se laisse lire par cette vraie originalité narrative.

    Néanmoins, après d'excellentes autres missions (Bons baisers de Russie, pour ne citer que lui), voici un petit 6/10 dans mon échelle de goût.
    Allez, ça y est, j'ai lu mon James Bond de l'été. Je peux donc reprendre une activité normale en me disant chaque année que ce James, d'un point de vue féministe du XXIe siècle, a quand même bien mal vieillit. Heureusement, il reste ses missions toujours spectaculaires.
    Ainsi que quelques traces de doigts sur les fesses.
    Par amour.

    05/08/2022 à 19:51

  • NOA

    Marc Levy

    8/10 Pour ce 3e et dernier (?) tome, pas de résumé introductif en bonne et due forme, mais un chapitre par protagoniste pour un rapide tour de table des vies de chacun des membres du groupe de 9 depuis le tome précédent.
    Toujours écrit sous la forme d'une interview, on replonge direct dans l'histoire de ces hackers. Et c'est du tout bon car l'interview est cette fois-ci synchronisée avec les évènements décrits. Ce n'est plus un récit du passé mais un élément du présent.

    Ici, le suspense est parfaitement maîtrisé avec toujours des histoires en parallèle : des opposants à un des régimes totalitaires qui a vacillé suite aux révélations du groupe 9 mais aussi un procès contre l'un des membres de notre nouveau groupe de hackers préféré. Le tout est bien orchestré et si le rythme aurait pu paraître lent, l'ensemble est bien cadencé pour donner envie de tourner les pages jusqu'au moment où, rapidement, l'action d'espionnage s'emballe pour tourner sauce Suspense, sur le terrain.

    Décidément, cette saga, couplée au style "Marc Levy" évoluant dans un nouveau genre a été un vrai coup de cœur inattendu du début à la fin. Seul bémol s'il en est : impossible de lire seulement l'un des 3 tomes de cette trilogie car s'il y a de très nombreuses "petites" histoires qui étaient bien pensées, le fil rouge est trop important pour ne pas considérer "9" comme un gros livre de 1200 pages.
    Il se pose ainsi sur l'échelon numéro 8 de mon échelle de goût. Ce qui est également la moyenne des 3 livres que je conseille vivement !
    Petit mot pour les haters de l'auteur, goûtez-y en faisant abstraction de qui a écrit cette histoire : vous allez être surpris par ce petit goût de... 9 (je ne pouvais pas ne pas la faire. Déso 😎)

    04/08/2022 à 09:21 2

  • Le crépuscule des fauves

    Marc Levy

    8/10 Heureux de me lancer dans cette "saison" 2, suite directe de la 1.
    Vraiment directe !
    J'avais été très frustré que rien ne se termine proprement dans le tome 1, C'est arrivé la nuit. Je suis ravi de reprendre aussi vite et aurais été très embêté si j'avais lu cette série dès sa sortie car comment attendre 1 an, même si le résumé en 4 pages introductives aide bien à se remémorer les innombrables histoires de chacun des membres du Groupe 9. J'enchaînerai d'ailleurs sans attendre, chose que je n'aime pas faire habituellement, avec la "saison" 3.
    Ici, comme annoncé, le groupe de hackers de haut vol (c'est rien de le dire quand on pique 250 millions d'euros) s'est réuni au mépris de leur règle principale qui consiste à ne jamais se connaître autrement que par tchat sécurisé et interposé.
    C'est très agréable à lire, c'est particulièrement intéressant avec juste ce qu'il faut d'éléments techniques sans pour autant être réservé aux seuls spécialistes du hacking, de la finance, de la politique internationale ou même par exemple de la cryptomonnaie et des réseaux sociaux ; ça ouvre les yeux sur l'époque moderne. Bref, je me suis laissé porter tout en ayant parfaitement conscience que les petites amourettes au milieu des scènes d'actions pourtant très satisfaisantes à elles seules, prouvaient que c'était bien un Marc Levy au sommet de son art auquel j'avais à faire.
    Sur la forme, chose amusante que je n'avais pas précisé dans mon avis du tome 1, les personnages vivent réellement dans notre monde actuel, et de fait même les personnages inventés par Marc Levy (ou leurs descriptions détaillées) sont tellement proches de personnalités connues que ça devient une sorte de jeu de perspectives que de trouver qui il a voulu croquer tout en se protégeant d'éventuelles représailles : à chercher du côté des Trump, Zuckerberg, Bachar El-Assad, milliardaires "stars", ou encore des sociétés "boîtes noires"...
    « Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé... Oh, et puis merde ! » nous balance même l'auteur en épigraphe de sa propre oeuvre.
    Hâte à présent de découvrir la conclusion de cette série de 3 livres, en sachant que Marc Levy himself a déclaré (devant le succès de sa saga naissante ?) qu'il s'était très attaché à ses personnages avec qui il a vécu durant les 4 années que lui ont pris l'écriture de cette histoire, donc qu'il y aurait très certainement une suite, en plus de l'adaptation télé par Costa-Gavras, excusez du peu mais on le comprend car tout est déjà super ciselé et découpé au point même où je me demande dans quelle mesure Marc Levy ne l'avait pas un peu espéré au fond de lui, même s'il dit le contraire.
    (Punaise, elle est longue cette phrase, non ? Marcel Proust, sors de ce misérable corps !)
    Voici donc un très estival 8/10 dans mon échelle de goût car cette fois-ci, non seulement je m'attendais à ce que tout ne soit pas terminé - contrairement au 1er tome qui m'avait déçu par surprise - mais aussi et surtout car je dévore le tout comme une excellente série de l'été.

    02/08/2022 à 18:53 2

  • C’est arrivé la nuit

    Marc Levy

    7/10 Une série sur un groupe de Hackers qui démarre très bien.
    Je ne m'attendais pas à ça de Marc Levy. C'est son style d'écriture, mais le fond est inattendu. Sur un sujet plutôt technique, il arrive à ne pas tomber du côté trop compliqué ni de celui du trop simpliste.
    Ce 1er tome va nous permettre de nous familiariser avec un groupe de 9 hackers doués dans leur domaine, et complémentaires. Ils se connaissent tous mais ne travaillent jamais tous ensemble sur un même objectif. Chacun de leur parcours donne une dimension intéressante au groupe et la manière dont est construite l'histoire est très agréable : on mélange un temps réel (un des 9 raconte l'histoire (laquelle ? Et qui raconte ?) à un journaliste qui lui pose des questions), avec un passé qui explique le présent et le tout saupoudré de flashbacks qui posent les contours de la vie de chaque personnage, expliquant comment il en est arrivé à être recruté dans ce Groupe 9.
    Ils ne sont pas systématiquement derrière un ordinateur et leur double (voire parfois triple) vie "banale" donne un effet très réaliste à ces hackers humanistes.
    On va entrer dans leur groupe en suivant à un rythme très soutenu des missions aussi diverses contre des terroristes ou encore des multinationales peu scrupuleuses.
    Si chaque mission pourrait paraître un peu légère pour être étayée sur la longueur d'un seul livre, c'est évidemment le fait qu'il y en ait plusieurs simultanément qui rend l'observation captivante. Vont-ils vers une mission plus grande qui nécessitera la coordination des 9 ? Il n'y a pas de chef mais est-ce parce que quelqu'un tire les ficelles, ailleurs ? Au sein du groupe ?
    Des tas de questions s'ouvrent et donnent envie de continuer avec eux au-delà de la dernière page.
    On oscille entre l'espionnage pure, les méandres de la haute finance, en passant par la politique dans ce qu'elle a de plus crasse. le tout avec une tonalité et une profondeur contemporaine qui donneraient envie de voir cette saga retranscrite à l'écran.
    Tout ceci positionne ce titre sur un très encourageant 7/10 dans mon échelle de goût, avec l'espoir que les autres tomes seront à la hauteur des attentes provoquées par cette amorce de licence.
    Pour être honnête, j'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce tome et le positionnais sur un excellent 8. Et ça, jusqu'à la fin qui oblige à 100% la lecture du tome 2, car indispensable pour obtenir les (débuts ?) de réponses tant attendues. Et ça, j'aime moyen.

    02/08/2022 à 18:50 2

  • La Fée Carabine

    Daniel Pennac

    9/10 Voici la suite directe des aventures de Benjamin "bouc émissaire" Malaussène, et ses histoires de famille entrecoupées d'intrigues policières.

    C'est toujours aussi jouissif de (re)lire ces expressions du réel, limite argotiques, dans un Paris bellevilois tranquille mais vivant, à l'humour parfaitement dosé. Les mots claquent, même si parfois c'est le contexte qui les fait comprendre. Les situations sont travaillées et très réfléchies. Les dialogues sont tout ce qu'il y a de plus réels. On veut les retenir pour tenter un jour de les replacer. Mais n'est pas Pennac qui veut.

    Daniel Pennac a été le premier auteur "coup de coeur" de ma vie. Celui qui m'a fait comprendre que les livres n'étaient pas tous détestables car tous techniques comme semblent vouloir nous le faire croire la plupart des profs de français. C'est justement l'une de mes profs de français qui me l'a fait découvrir et elle a, à elle seule grâce à cet aiguillage du destin, rehaussé mon amour pour le verbe, les histoires et l'écriture, bref, la littérature.
    Et pourtant, Pennac EST technique. Mais au contraire de ceux qu'on décortique, c'est naturel, c'est fluide, c'est la vie. On s'attarde plus sur l'imaginaire que sur les allitérations cachées voire inexistantes sauf dans la tête de certains illuminés et pseudo-eveillés qui voudront nous faire croire qu'ils ont entendu ce que l'auteur lui-même n'a jamais voulu exprimer.

    Ici, plusieurs enquêtes se croisent et se recroisent. Benjamin Malaussène, bouc émissaire professionnel - carrière qu'il a choisie - devient bouc émissaire d'une enquête policière - statut qu'il subit. Il est et restera donc un bouc émissaire à 360° pour notre plus grand plaisir de lecteur.

    Sache-le : ma fameuse échelle de goût a été créée à partir de la saga Malaussène. Et ce 2nd tome que j'ai relu avec plaisir plus de 20 ans après trône sur l'echelon numéroté 9/10 de mon plaisir. Et le point "manquant" ? Il est celui qui me fait rêver depuis tant d'années et il est aussi de Daniel Pennac que je garde au fond de mon esprit, de ma syntaxe et de mes mots. Merci Monsieur Pennac, vous avez changé ma vie.

    30/07/2022 à 20:25 4

  • Labyrinthes

    Franck Thilliez

    10/10 Ras-le-bol de Franck Thilliez.
    Chaque année il écrit un livre.
    Chaque année je le dévore.
    Chaque année, je me casse la tête à trouver de nouveaux mots pour dire à quel point il m'a littéralement emporté dans ses histoires épouvantables.

    Il croit quoi ce monsieur ? Tout recordman de Prix Polars Pourpres qu'il est, on est de simples lecteurs, nous ! On n'a pas une imagination si débordante qu'on peut trouver de nouveaux qualificatifs chaque année pour décrire le plaisir qu'on a eu de le lire. Non mais ho ! Du respect pour ceux qui ne savent que lire.
    Certains auteurs mettraient une vie à trouver autant d'idées que lui en 1 seul livre. Mais qu'à cela ne tienne. Il n'a aucun remord vis-à-vis de ses autres camarades auteurs car lui, il excelle dans des récits imbriqués ; comme si son oeuvre était une immense toile tissée qu'il a imaginée depuis la première ligne de son premier roman.

    Et puis alors bonjour l'auteur machiavélique : on dit que le manuscrit inachevé est top ? Paf ! Il écrit une suite encore meilleure. Comble de bêtises de lecteurs assidus, on ose dire qu'on a bien aimé aussi la suite, alors je vous le donne en mille, il écrit un troisième volet.
    Comme si ses idées horriblissimes et tordues sur un seul personnage ignoble ne tenaient pas en 1 seul livre. Comme si une seule fin n'était pas suffisante.
    Genre.
    Et là, ce troisième volet, il faiblit ?

    Même pas !

    Môssieur Thilliez, il trouve encore le moyen d'étendre l'histoire et l'univers en se réinventant. Encore !
    Celui-ci, comme les 2 autres de cette "série", on pourrait le lire indépendamment, mais ce serait perdre un peu du goût de chaque ingrédient disséminé savoureusement par Franck "master of thrillers" Thilliez. Les personnages secondaires d'un livre se retrouvent dans le suivant, en pleine lumière (noire). Chaque vie (et/ou mort) est expliquée, remontée, détaillée... liée.
    Ici, on va alterner entre des chapitres courts et longs avec à chaque fois l'histoire d'un des protagonistes qui va frustrer le lecteur à chaque dernier mot pour mieux y revenir 2 chapitres plus loin. Très fort ! Et ça se tient. A la perfection. Tant durant ce livre qu'avec les précédents. Terrifiant !

    En bref, un 10/10 dans mon échelle de goût.
    Et c'est tout. Ça mérite pas plus sans quoi mon cerveau risque de bouillir comme celui de chacun de ses malheureux personnages.
    Je ne sais pas quoi dire sur cet auteur.
    Ah si : Ras-le-bol de Franck Thilliez. Un livre chaque année, c'est vraiment trop peu.

    16/07/2022 à 14:51 6

  • Âmes animales

    José Rodrigues dos Santos

    5/10 Tour de force : ce livre s'étale sur 500 pages mais l'histoire est ultra courte ! A mon avis, pas plus de 3h entre le meurtre et sa résolution (hors flash-back évidemment). Ça pourrait être hyper dynamique. Bé non. Il ne se passe quasi aucune action. Juste du partage de connaissances entre les personnages.
    JR Dos Santos, mon auteur portugais préféré, avait une fois de plus trouvé un super terreau pour faire vivre une belle aventure à Tomàs Norhona : les animaux sont nettement plus proches de l'homme dans leurs comportements qu'on ne le croit depuis toujours. Culture, compétences, intelligences, régionalisme, art, émotion,... Tout y passe !

    L'histoire se résume sur un timbre poste : un meurtre d'un soigneur d'animaux. Tout accuse la femme de Norhona. Elle s'enfuit face à la police. Son mari va tenter de prouver son innocence en... s'enfuyant aussi, histoire de montrer qu'il a 2 jambes en plus d'un cerveau. Sûrement.

    Notre héros, pour rappel, a sauvé le monde 3 fois minimum et personne autour de chez lui ne le connait !? Donc pas de bénéfice du doute face à cette éminence qui a pourtant ses entrées au CERN, dans les appartements du pape au Vatican (in Vaticanum) et chez la plupart des puissants de ce monde (in Furie divine), voire des extraterrestres (in Signe de vie). Mais face à la police portugaise, Tomàs n'est plus personne ! Bref...

    Ce livre n'est au final qu'une suite d'infos sur les animaux et par ricochet de l'environnement. Alors oui, on en apprend énormément (et même énormément ! Et j'ajouterai aussi énormément) comme toujours avec JR Dos Santos. Ici, le fond porte sur les animaux et le biais que les hommes ont créé dans l'analyse de ces êtres, quelles que soient leurs races. Mais la pauvreté de l'intrigue l'emporte sur les cours magistraaux des sachants qui vont parler des pages et des pages durant.
    Les sachants sont prétentieux et les apprenants sont parfois limite benêts ! Un duo pas des plus agréables pour s'identifier à l'un ou l'autre.

    Un point positif : j'ai découvert la potentielle existence d'un nouvelle organisation secrète très ancienne : la rose-croix à laquelle ont appartenus certains hommes très connus qui ont laissé leur trace dans l'Histoire pour de toutes autres raisons que la cause animale ; mais comme cette partie était plutôt sympa, je n'en dirai pas plus pour ne pas gâcher le plaisir de le découvrir.

    Pour revenir à mon plaisir de lecteur, cette fois-ci, alors que je n'y connais rien en "animaux", je n'ai pas adhéré à cette vision des choses. Certes, les animaux ont des émotions et autres attibus qu'on croyait propres aux humains, - ça n'est parfois même plus à démontrer - mais malgré l'effort de l'auteur pour convaincre des bien-fondés de cette théorie défendue (ou pas) du livre, je n'ai pas été touché.
    Sur le presque-même sujet des sentiments, de la connaissance et du langage homme/animal, Les fourmis de Werber (qui s'attardait alors sur un seul animal) m'a beaucoup plus embarqué même si moins "scientifique".

    Sur la cause animale et la maltraitance dont on voit parfois des images choquantes, on y a aussi droit pendant plusieurs chapitres assez répugnants car... très bien documentés. Celui qui ne flanchera pas un minimum sur sa prochaine tranche de jambon n'a pas de cœur. Pour ma part, je continuerai quand même à me nourrir de jambon et de poulets donc si j'étais la cible, c'est raté. Je pense qu'il convaincra tout juste les convaincus, même s'il est vrai que le sort que les hommes réservent aux animaux est souvent cruel et... inhumain.
    « Autrefois, les gens savaient qu'ils mangeaient des animaux puisqu'ils les voyaient se faire égorger devant eux. Ils voyaient, ils comprenaient et ils respectaient ce que cela voulait dire. »

    Donc pour cette histoire avec un fond et une forme pas assez convaincants pour moi, je la place sur l'échelon d'un honorable 5/10 dans mon échelle de goût et j'attends sagement son prochain titre avec impatience.
    Et j'ajouterais juste que je suis certain que la moyenne d'appréciation de ce livre sera au-dessus de mon propre échelon car il touchera sûrement pas mal de monde. Mais pas moi. Pas cette fois-ci en tous cas.

    06/06/2022 à 09:59 3

  • L'Affaire Caravaggio

    Daniel Silva

    9/10 Ça fait très très longtemps que je voulais découvrir les aventures de cet agent secret israélien qui évolue dans le domaine de l'art : Gabriel Allon.
    C'est chose faite avec cette histoire qui démarre avec le meurtre particulièrement sanglant d'un personnage trouble de ce marché où les secrets n'ont rien à envier aux espions les plus aguerris.

    Les chapitres sont très longs et plutôt lents mais c'est la première fois que ça m'enchante ! On est plongé dans un univers feutré, plein de mystères, sur lequel le temps n'a pas d'emprise. On voyage de pays en pays (beaucoup en France puis en Allemagne) et également dans le temps avec des détails tout sauf insignifiants sur la guerre en Syrie, mais aussi et surtout sur Van Gogh, Le Caravage et d'autres artistes qui forment une forêt dense de laquelle il est difficile de sortir une fois entré.

    Cet univers a tout pour offrir aux auteurs qui le maitrisent des possibilités infinies d'intrigues. Et Daniel Silva semble parfaitement calé en la matière. Des collectionneurs aux faussaires en passant par les restaurateurs et galeristes, intermédiaires troubles et milliardaires puissants, tout est admirablement intégré dans une histoire alambiquée mais très claire. On va passer de l'art à la finance, mais comme les passerelles sont fines et entremêlées entre elles, tout est fluide.
    A partir de la 2nde moitié du livre, ce sont exclusivement des rouages financiers, liés au terrorisme syrien qu'on va vivre. C'est probablement technique mais c'est super propre !

    Les dialogues donnent des coups d'accélérateur assez dingues et je n'arrive pas à savoir si ce sont justement ces joutes verbales ou les situations qui m'ont le plus enchantées. Probablement les 2 !

    Ce n'est pas la 1ere aventure publiée de Gabriel Albon (la 14e !), et c'est un peu dérangeant de voir fleurir ci et là des allusions à ses affaires précédentes dont on se demande si elles ont été traitées dans des tomes précédents ou juste des apports à la psychologie des personnages. C'est subtile, mais comme tout héros, ça contribue à forger son caractère et explique certaines de ses décisions.
    L'histoire m'intéressait, j'aurais du être plus attentif aux précédents tomes pour profiter pleinement des subtilités glissées et à oublier si jamais je veux lire les tomes passés.

    Quoiqu'il en soit, je n'ai pas été déçu. Cette saga me reverra ! J'ai appris des tonnes de techniques, tant sur la peinture, que la copie ou même les vols de tableaux et les circuits financiers troubles des dirigeants souvent encore au pouvoir dans leur pays (Syrie, Russie en tête) Aucun risque que je m'essaie à l'une de ces disciplines, mais c'est vraiment emballant !

    Je le pose donc délicatement sur un chevalet et me recule doucement pour admirer ce 9/10 dans mon échelle de goût.

    27/05/2022 à 11:11 1

  • Une journée avec Spencer Brooks

    R. J. H. Lascols

    7/10 Enorme, absurde, insolite et impossible.
    Ce sont les qualificatifs utilisés par les personnages pour décrire leur histoire.
    Et je trouve que c'est plutôt juste pour donner envie de s'intéresser à ce titre.

    Au début, on pense irrémédiablement aux séries Surival horrifique à succès telles que Lost, Wayward Pines (beaucoup) ou parfois même Walking dead voire, sous certains aspects, Westworld.
    Et puis, on touche au Prisonnier. Un peu à l'ambiance de Twin peaks.
    Bref, on touche à pas mal de productions à succès, et je me suis interrogé tout au long de ma lecture avec des rebondissements très surprenants voire déroutants.
    Mais je me suis laissé prendre au jeu. 340 pages qui défilent. Pas super vite mais avec suffisamment d'interrogations pour ne pas avoir envie de m'arrêter.

    Petite digression personnelle : quand je positionne un livre sur mon échelle de goût - je ne note jamais un auteur ou un livre, pour rappel ! -, je me fais régulièrement une idée avant la fin puis je repositionne mon curseur au grès des chapitres car je veux surtout me rappeler de mon plaisir de lecteur qui, par nature, fluctue selon ce que l'histoire arrive à éveiller en moi.
    Et là, mon appréciation était plutôt positive au fur et à mesure du livre, mais il me manquait un petit truc en plus. D'autant que l'auteur est décrit comme un élève de Werber. La promesse était un peu trop forte pour que j'approuve totalement.
    Mais...

    Jusqu'à ce que j'arrive aux 50 dernières pages.
    Là, tout s'est éclairé. Petit à petit. Avec délectation et brio. Ceci avec un savant mélange d'infos scientifiques et d'imaginaire, teinté de réalité. J'ai donc beaucoup beaucoup aimé cette fin !! Une idée digne de... Werber !
    On parle de littérature, de science, de neuro... Franchement, ça se termine presque trop bien.

    Donc, compte tenu de ce genre de suspense, et compte tenu surtout de cette fin, je me suis fixé sur un mémorable 7/10 qui agrémentera sûrement quelques rêves à venir.
    Et comme dit l'auteur : après ça, je risque de ne plus lire un livre de la même manière. Et là, je sais d'avance que la promesse va être tenue !

    01/05/2022 à 21:18 1

  • Jules

    Didier van Cauwelaert

    9/10 Comme le monde de Nemo a été un accélérateur d'acquisition de poissons clown, ce livre le serait tout autant pour des chiens comme Jules !
    Qu'il est bon ce chien. Qu'il est attachant. Qu'il est fort en rapports... humains.
    Drôle et tendre, et inversement, ce livre ne laissera personne insensible à Jules. Et inversement.

    24/04/2022 à 13:53 2

  • Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire

    Jonas Jonasson

    7/10 J'ai eu l'impression de lire un remake libre de Forest Gump. Et quand bien même : c'était pas mal du tout ! Je me suis laissé porté par ses pérégrinations un peu lentes (il est vieux, donc normal !) mais très riches en histoires.

    24/04/2022 à 13:48 1

  • Douce, douce vengeance

    Jonas Jonasson

    8/10 Karma.
    Karma aurait pu être un des titres de ce livre.
    Un type banal mais surtout méchant et égoïste, a un plan pour gravir les échelons de la société et l'influencer de ses idées nauséabondes, lui qui à la base n'est rien, pas même sur le plus petit barreau d'une quelconque échelle sociale.

    Il ne s'embarrasse pas des problèmes : il n'en a pas, et quand il en croise un, il le règle sans chercher à savoir ce que l'autre ou les autres en penseront, tant que ça sert son fameux plan.

    Une femme utile ? Un enfant inattendu ? Un patron assez peu regardant ? Un métier pratique ? ... Tout ce qui peut lui servir de marche-pied, va lui permettre de filer droit vers son objectif.

    Son plan est parfaitement ficelé.

    Mais un jour, tout va s'enrayer, ses actions vont se retourner contre lui. Pas par le fruit du hasard, mais bien par la volonté de ceux qu'il a maltraités, enfin éveillés.
    Son ex-femme et son ex-fils (bé oui, j'ai dit qu'il était sans scrupules en laissant derrière lui tout ce qui ne lui servait plus à progresser vers les sommets !) vont chercher à se venger, aidés par Hugo, un entrepreneur providentiel qui vient d'ouvrir une agence de services fomentant des vengeances parfaites.

    En même temps, un guerrier Massaï débarque en Suède, et là s'arrête ce qui semblait être un conte pour se transformer en un excellent vaudeville.

    C'est doux, c'est acidulé, c'est malin, c'est du Gilles Legardinier suédois (compliment !) avec une base saupoudrée d'absurde de situation tel que croisé dans le film Alibi.com... Ça se lit super bien, on passe un moment agréable sur moins de 300 pages.
    L'histoire principale est entrecoupé de saynettes saugrenues de... douces vengeances dans lesquelles le fameux karma prend parfois le dessus.
    Un délice.

    Ceci est mon 2nd livre de Jonas Jonasson après Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire, le roadmovie d'un Forrest Gump centenaire. Et nous sommes typiquement dans le même schéma : des personnages humains, une histoire à plusieurs branches, beaucoup d'humour et une morale sur une société décrite au naturel, sans chichi.
    Peu de dialogue, mais suffisamment pour sourire et rire (sans spoiler ceux qui le liront et juste pour raviver des souvenirs à ceux qui l'ont lu, je pense au zizi coupé, au lama, aux guerres des voisins, à ce bon vieux Matisse, à LA chèvre, l'inspecteur à 5, 4, 3, 2 jours de la retraite...). Tout est amusant ou cherche à l'être à celui qui veut profiter d'un bon moment de lecture.

    Dans mon échelle de gout, je le place sur l'échelon d'un amoral 8/10, avec des bonnes idées de vengeances et de business à piocher !

    18/04/2022 à 15:28 4

  • Les enfants sont rois

    Delphine de Vigan

    8/10 Mélanie Claux a vécu, comme hypnotisée, les aventures des habitants du premier Loft Story depuis son canapé. Elle va grandir dans l'espoir de devenir un jour la nouvelle Loana, celle qui a été couverte de gloire à sa sortie du loft. Et si la télé-réalité s'est refusée à elle malgré quelques tentatives ratées, elle sait ce qu'elle veut : devenir célèbre.

    Les premiers chapitres sont construits sur une écriture sèche, brute, hachée, directe et décousue qui fait référence à ce que la génération "loft Story" a vécu. A cela s'ajoutent des va-et-vient dans le passé et dans le présent, le tout entrecoupé de Story Instagram décrites visuellement et conformes à celles qui nous inondent sous forme de vlog et de vies plutôt banales mais très actives donc addictives.

    Le rythme de départ est spécial, pour ne pas dire déroutant.
    Si on ne sait pas de quoi le livre parlera, on se demande même où l'auteur veut en venir.
    Ça va durer une cinquantaine de pages.

    Et puis, retour définitif dans le présent, alors que Mélanie est devenue célèbre et riche en mettant en scène sa vie de famille parfaite, sa fille disparaît durant une partie de cache-cache, juste avant la traditionnelle storie qui va annoncer la sortie de leur nouvelle vidéo. Elle a 6 ans, son frère aîné 8.

    Clara Roussel, procédurière à la crim, entre alors dans la danse avec cette enquête qui démarre.
    2 mondes vont alors se dévoiler l'un à l'autre : celui qui est joué devant une caméra et celui qui est vécu, loin du paraître des réseaux sociaux.
    Les retours dans le passé ne sont plus que des flashbacks de quelques minutes, au gré de la découverte des vidéos de la famille, pour comprendre leur(s) vie(s), virtuelle et réelle.

    L'enquête va nous permettre de découvrir les 2 mondes qui se font face, et dont le "réel" ne soupçonne pas ce que le "virtuel" offre à ceux qui le fabriquent et le regardent.
    Cette enquête ne va pas pour autant s'arrêter au présent. On est parti d'un passé pas si lointain, pour s'étendre jusqu'à un futur tout proche, en 2030.

    C'est un récit fort sur l'image, sur l'évolution de notre société, sur les dérives d'une manière de vivre, de communiquer nouvelle et maîtrisée uniquement par ceux qui l'ont choisie. Rien de nouveau donc pour qui connait les réseaux sociaux et suit les stories Instagram, les chaînes YouTube mettant en scène les familles et enfants plusieurs fois par jour durant plusieurs années au point qu'on a l'impression de les connaître.
    Pour ceux qui n'ont jamais vu de vidéos d'unboxing (les enfants sont filmés en train de déballer des cadeaux), tout ça va leur sembler irréel.

    Les personnages sont très bien décrits au point où il est difficile de ne pas s'identifier. Parfois à l'un, parfois l'autre. On comprend tout le monde quand on est entre ces 2 mondes. C'est absolument dingue !
    On pense irrémédiablement à 1984. Forcément ! C'est un futur qui va se réaliser. On est même déjà dedans. On file vers une explosion des cas de troubles psy à la Truman Show.

    Je ne dirai pas que ce livre me fait peur. En tous cas, il me fait réfléchir sur les lois, inadaptées ou trop floues, pour protéger nos vies et celles des générations à venir. Et on ne parle pas ici seulement des vies numériques.

    Les frontières de l'intime se sont déplacées depuis quelques années, depuis l'avènement de la télé-réalité puis des réseaux sociaux. Et ces derniers en sont seulement encore à censurer des bouts de seins ou de fesses, mais ils ne censurent pas les enfants dont l'anonymat auquel chaque être humain à droit est déjà perdu. Définitivement.

    On se rend compte que toute l'intimité postée, affichée naïvement (ou vénalement, ou cupidement) cherche à générer du plaisir alors qu'au fond il génère tout autant angoisse et tristesse sur le long terme.
    Intéressant !

    Un éclairant 8/10 dans mon échelle de goût, avec une enquête bien menée et surtout, surtout, un sujet de société magistralement exposé qui ouvre un débat qui va devoir trouver des réponses plus claires et fermes pour sauver des vies.

    14/04/2022 à 18:49 1