El Marco Modérateur

3219 votes

  • Blood sample

    Karim Madani

    8/10 C’est le lot de toute série littéraire de voir certains de ces épisodes être moins bons que les précédents. Et c’est donc avec un plaisir décuplé que l’on finit cet ouvrage noir et bouleversant, rythmé et incisif, où la localité brossée nous renvoie l’image acide de la déchéance de nos banlieues où subsiste néanmoins le fil ténu de l’espoir.

    11/05/2014 à 18:38 1

  • Trente jours d'obscurité

    Jenny Lund Madsen

    7/10 Hannah Krause-Bendix, quadragénaire, est une écrivaine danoise qui n’a jamais réussi à percer. Son œuvre se veut exigeante et elle ne supporte pas ses confrères qui vendent des centaines de milliers d’exemplaires. Lors d’un salon littéraire, elle se prend le bec avec Jørn Jensen, vedette du polar, et le défi tombe rapidement : qu’Hannah soit capable d’écrire un ouvrage policier en trente jours. Direction l’Islande, un voyage programmé par son éditeur, Bastian, où elle va loger chez Ella. Un drame survient rapidement : Thor, le neveu de la logeuse, est retrouvé noyé. Accident ? Suicide ? Meurtre, peut-être ? Le moins que l’on puisse dire, c’est que le séjour d’Hannah ne va pas être de tout repos.

    Ce roman de Jenny Lund Madsen séduit rapidement par sa plume alerte. Hannah est un personnage pour lequel on nourrit immédiatement de la sympathie, elle qui a un léger penchant pour la boisson sans pour autant être alcoolique, se débat avec une carrière pour laquelle elle nourrit une solide fierté alors que ses lecteurs sont très peu nombreux, et qui se cherche encore du point de vue amoureux. Les trente jours en Islande devaient être intéressants et opportuns pour relever le challenge de cette écriture empressée d’un livre, mais elle va être confrontée au décès de ce jeune Thor. La suite des événements sera assez mouvementée, avec des rencontres tonitruantes, des suspects multiples, et de sordides secrets de famille qui ressurgiront en fin d’ouvrage. Indéniablement, Jenny Lund Madsen sait mener un récit, et l’humour qu’elle y instille est salvateur, dans les dialogues comme dans les situations – les passages entre Hannah et Jørn sont parfois tordants. Dans le même temps, l’auteure nous gratifie de jolies réflexions et analyses quant à la littérature, selon qu’elle se veut sérieuse voire élitiste ou plus populaire et distrayante. L’intrigue présente quelques éléments attendus mais sa résolution, à défaut d’être très originale, n’en demeure pas moins crédible et efficace.

    Un roman policier de belle tenue, très divertissant et enjoué, où l’écrivaine nous ravit davantage par son style et sa décontraction que par son intrigue – somme toute assez classique mais solide.

    29/03/2024 à 06:59 5

  • Bon pied, bon oeil et 99 autres expressions autour du corps et de la santé

    Marc Magro

    7/10 Comme le rappelle le titre alternatif de cet ouvrage, il s’agit de « 99 autres expressions [donc 100 en tout] autour du corps et de la santé ». L’auteur, médecin urgentiste, connaît son affaire et a signé un joli livre autour de ces expressions typiquement françaises, même si certaines d’entre elles trouvent des échos ailleurs dans le monde, plus particulièrement en Europe, voire des traductions très proches ou, paradoxalement, très éloignées. Il y en aura pour tous les goûts, depuis les formules assez actuelles jusqu’à celles venant de l’Antiquité ou du Moyen Âge. Certaines d’entre elles sont couramment utilisées (« Avoir un cheveu sur la langue », « Pomme d’Adam »), d’autres bien moins usitées (« Si on lui pressait le nez, il en sortirait du lait », « Le cul sur le visage ») et d’autres encore tellement surannées que les personnes qui les utilisent encore de nos jours doivent être rares (« Avoir du sang de navet », « Manger comme un chancre », « Refaire son nez », « Un va-du-gland »). A chaque fois, il y a eu de véritables recherches historiques pour voir à quand remontaient ces préceptes, presque des dictons, d’où elles pouvaient provenir (parfois, j’ai trouvé certaines explications un peu nébuleuses ou trop subjectives pour y adhérer totalement), ainsi que des extraits de textes classiques pour les illustrer. Marc Magro nous offre au passage quelques recommandations typiquement issues de la bouche d’un médecin, donc soucieux de notre bonne santé, et de jeux de mots pas toujours très réussis mais agréables et venant à point nommé. Moi qui ne suis pas fan des livres « réalisés à l’agrafeuse », ce que j’entends comme des recueils de textes disséminés au gré d’émissions radiophoniques, d’articles dans les journaux ou déjà vus ou lus un peu partout ailleurs, je n’ai jamais boudé mon plaisir. En un seul ouvrage, j’ai eu droit à de la médecine, de l’histoire, du littéraire et de l’humour, ou comment accoler culture et divertissement au gré de ce spicilège que l’on peut tout aussi bien butiner que lire d’une traite (ce qui a été mon cas).

    23/10/2019 à 08:58 1

  • Les tigres ne crachent pas le morceau

    Michel Maisonneuve

    7/10 Alors que le cirque vient de s’installer à Marseille, le dompteur Hildeberg est retrouvé mort, les morceaux de son cadavre dispersés dans les trois cages des tigres. Un indice supplémentaire : la trace d’un objet cylindrique planté dans la glotte. Le directeur, Raoul Babinetti, demande à son vieil ami Dachi El Ahmed de mener discrètement l’enquête, en se faisant passer pour un charmeur de cobra. Mais parmi tous les artistes, nombreux sont ceux qui en avaient après le défunt…

    Voilà un ouvrage qui n’engendre pas la mélancolie. Michel Maisonneuve donne le ton dès les premières pages : ça sera décomplexé, coloré et vibrionnant. On se retrouve ainsi avec une pléiade de personnages truculents dont, à la manière d’un bon vieux whodunit, chacun peut être le coupable. Giuletta Pantaleoni, la sulfureuse épouse du chef du cirque. Raoul, homme-canon au caractère bien trempé. Mitchum, ainsi surnommé en raison de sa ressemblance avec l’acteur, illusionniste et lâchant souvent des citations de Shakespeare et de Baudelaire. Perle de Rosée en Jade Précieux, la belle acrobate asiatique. Alice, jeune fille capable de faire du trapèze, de tirer les cartes ou de dresser des criquets. Bibi le clown. Miléna, la belle écuyère. Et c’est également sans compter sur des protagonistes extérieurs à cet univers circassien comme un policier ou un journaliste. Le ton est alerte, les chapitres courts et vifs, et l’humour omniprésent. On se régale des situations, burlesques et volontairement décalées, et des dialogues, bien poilants. Dachi est un limier amusant, adepte du soufisme et de pensées du poète Omar Khayyam, et tombant rapidement sous le charme de la magnifique Léda. L’auteur nous gratifie ainsi d’une joyeuse cocasserie de la première à la dernière page, notamment d’une scène de course-poursuite décrite à la manière d’un commentateur hippique. L’intrigue n’est pas pour autant laissée de côté et, même si elle ne marquera probablement pas longtemps les mémoires, a l’immense mérite de ne pas être plate, entre trafic de drogue, adoption, prostitution, et même une malle inspirée de l’immense Houdini qui aura toute sa place dans le dénouement.

    Un roman distrayant, dont la bouffonnerie assumée ne vient pas éclipser un scénario bien bâti. C’et parallèlement un bel hommage que rend Michel Maisonneuve à un monde en déclin, celui des clowns et autres artistes nomades, des plaisirs simples et innocents. Un témoignage d’amitié teinté de nostalgie mais aussi de malice.

    22/02/2023 à 08:08 1

  • Double.Me tome 1

    Miki Makasu, Otosan

    7/10 Un réseau social, « Double Me », vient de développer une nouvelle application baptisée « Résurrection », qui promet une forme d’immortalité pour ses utilisateurs. En cas de décès, une intelligence artificielle va analyser toutes les informations sur le défunt et le faire revivre, au moins virtuellement. Aiko et Eri sont deux lycéennes, les meilleures amies du monde. Vient le jour où Eri est abattue chez elle par un inconnu d’une balle en pleine tête et il se pourrait que cette exécution soit en rapport avec les liens que son père, un homme politique, entretient avec les yakuzas. C’est alors que le « double d’Eri se manifeste et que Aiko va lentement se laisser manipuler jusqu’à aboutir à l’assassinat, tout ça pour les beaux yeux de Dosan. Un scénario intéressant, je me suis vraiment laissé prendre par l’histoire mais le rythme est assez lent, ce qui a au moins l’avantage de bien poser les personnages et de rendre l’ensemble plausible, et le récit met davantage en avant les amourettes d’Aiko pour Dosan, avec cette satanée Cho qui vient s’immiscer entre eux deux. Le final relève le niveau, avec (enfin) un peu d’action et une image ultime forte et inattendue qui offre une belle passerelle pour le tome suivant. Je pense que je serai au rendez-vous.

    24/03/2022 à 18:58 1

  • 1952

    Alex Maleev , Mike Mignola

    7/10 Bruttenholm et son protégé Hellboy ainsi que quelques soldats s’envolent, direction le Brésil et une étrange citadelle où se déroulent d’étranges phénomènes… Pour moi, le plaisir d’enfin me lancer dans la lecture d’un véritable comics et de retrouver l’inénarrable Hellboy qui a rapidement fort à faire face à une sorte de singe qu’il combat dans l’ancienne église, un crocodile, la découverte de sordides expérimentations, Raspoutine et d’enfiévrés fanatiques nazis, etc. Un sacré cocktail d’action pour une lecture particulièrement divertissante.

    17/05/2023 à 18:58 1

  • Il va venir

    Marcus Malte

    8/10 Un très bon roman pour la jeunesse, court et prenant. Triple unité – de lieu, de temps et d'action – avec ce qu'il faut de tension pour passer un agréable moment. La plume de Marcus Malte est vive, adaptée à la fois au lectorat visé et aux personnages mis en scène, et l'ensemble se lit avec plaisir. Ce fut mon premier livre de l'auteur, qui plus est issu de sa bibliographie destinée à la jeunesse, et je ne doute pas un seul instant que j'en lirai d'autres de lui dans un avenir proche.

    13/07/2011 à 18:42 1

  • Les Cow-Boys

    Marcus Malte

    9/10 Un récit très prenant et marquant, où l’humour de certains passages confinent à l’absurde (l’épisode du lama) tandis que la fin fait frissonner autant qu’émouvoir. Une réussite totale à mon goût.

    27/01/2015 à 18:50 2

  • Les Indiens

    Marcus Malte

    8/10 Une nouvelle très agréable, avec des personnages marquants et attachants. Les destins tourmentés de trois personnages liés par l’amitié et l’amour, avec la plume efficace de Marcus Malte.

    14/04/2014 à 18:50 3

  • La Maladie de Chooz

    Michael Maltravers

    6/10 … ou comment Merry Pontus en vient à enquêter sur une bande de fêlés terroristes, regroupés sous la bannière d’un gang ultra politisé baptisé « La Tendance », qui a décidé de secouer le monde en répandant des radiations et créer le chaos. C’est mon premier ouvrage de Michael Maltravers, et ça sera peut-être le dernier. Je ne suis pas trop fan des romans d’espionnage, mais j’ai tenté l’expérience une fois de plus, histoire de vérifier. Le style est très agréable, joliment tourné, avec pléthore de formulations gentiment fleuries et surannées, mais j’ai trouvé que l’ensemble manquait un peu de corps, voire d’âme. Si l’on excepte les ultimes pages qui savent se montrer poignantes, la globalité me paraît assez désincarnée, sans grande profondeur, et même les scènes d’action (par exemple avec les sous-marins) m’ont laissé assez froid. Bref, ça ne me laissera certainement pas un souvenir durable ni ne m’a emballé, mais c’est probablement en grande partie parce que je ne suis que moyennement fan du genre.

    07/06/2020 à 18:13 2

  • Kujô l'implacable tome 1

    Shôhei Manabe

    7/10 Taiza Kujô est un avocat japonais qui accepte de défendre un chauffard qui a renversé quelqu’un alors qu’il était sous l’emprise de l’alcool et jouait sur son portable. Il lui prodigue de précieux conseils dans le cadre de sa défense tandis que l’on apprend qu’un homme est mort dans la collision et que son fils s’est fait amputer d’une jambe. Taiza est-il un affreux salopard ? Non : « Un avocat agit sans principe et sans idéologie », explique-t-il. Le portrait d’un défenseur très particulier, froid et intelligent, fin connaisseur des règles judiciaires et conscient de leurs failles, tacticien hors pair et hermétique aux notions de morale humaine. Intéressant et original. Je vais tâcher de suivre cette série.

    15/01/2024 à 18:24 2

  • Ushijima, l'usurier de l'ombre tome 1

    Shôhei Manabe

    7/10 Ce manga commence par la découverte d’un groupe de femmes accros au pachinko et à qui il faut distribuer de l’argent pour qu’elles puissent obtenir leur shoot de jeu. Mais c’est rapidement dans l’univers glauque de la misère et de l’usure que l’on bascule, avec des proies parfois obligées de se prostituer pour revenir à flots de leur créancier. On y découvre l’usurier Ushijima, dur et affûté comme le monde qu’il côtoie, et présentant des caractéristiques originales (ayant les lapins comme passe-temps, prêt à déchoir une dame de son trône de prêtresse du crédit clandestin). Les passages mettant en scène Kumika sont particulièrement durs puisqu’en rapport avec de la prostitution forcée, tandis que l’autre partie de l’opus, centré sur un autre débiteur des chasseurs de « yamikins « (c’est-à-dire ces usuriers de l’ombre) offre un autre souffle à ce manga particulièrement oppressant, plus centré sur la déchéance des victimes et du système mis en place que réellement Ushijima en lui-même.

    18/04/2020 à 15:24

  • Ushijima, l'usurier de l'ombre tome 2

    Shôhei Manabe

    6/10 L’opus commence avec trois ados qui « empruntent » un scooter avant de se rendre compte qu’il appartient à quelqu’un de peu fréquentable. Pour rembourser un service rendu par Ushijima, ils vont se mettre à travailler pour lui. Ils mettent alors le doigt dans un engrenage bien dégueulasse, comme lorsque l’un d’entre eux est sommé de prendre des photos d’une femme nue… qui n’est autre que sa propre mère. D’habiles jeux de pouvoir, de manigances et d’allégeances trahies pour un univers toujours aussi sordide. Même si j’ai aimé retrouver cette série, j’ai trouvé que l’intrigue patinait un peu, ou alors est-ce parce qu’une partie de l’effet de surprise s’est évaporé.

    24/05/2020 à 18:05 1

  • Inflammation

    Eric Maneval

    9/10 Liz vient de disparaître dans ce qui ressemble à un accident automobile. Elle laisse un époux éploré, Jean, ainsi que deux enfants, Lucie et Clément. Mais quelque chose ne tourne pas rond : dans le village où habite la famille, de sombres nuages s’amoncellent. Liz est-elle réellement décédée ? Et quels secrets a-t-elle emportés avec elle ?

    Voilà un roman singulièrement noir, signé Eric Maneval. Il est assez court (deux cents pages), et tous les mots et péripéties y sont comptés. Pourtant, il est impossible, une fois le dernier chapitre achevé, de ne pas ressentir un immense frisson en même temps que l’impression tenace d’avoir vu défiler une étonnante abondance d’événements. Tout commence comme un simple fait divers, puis on bascule lentement mais sûrement vers une littérature particulièrement sombre. De multiples éléments se télescopent : des amis qui ne correspondent peut-être pas à l’image qu’ils donnent, des locataires réunis en une étrange communauté, un mystérieux laboratoire situé en Belgique, le père génétique de Lucie qui réapparait via une émissaire au comportement énigmatique, une confectionneuse de confitures, un homme que Jean surnomme « le Révérend », etc. Un véritable magma de personnalités obscures, qui bouillonne comme un plat mijote, paisiblement et graduellement. Le lecteur sera immanquablement séduit par la plume d’Eric Maneval, à la fois sèche et paradoxalement fertile en émotions suscitées, jusqu’au final. De nombreuses clefs sont offertes dans les ultimes pages, mais il sera impossible de ne pas tomber dans un incroyable vertige de noirceur, en même temps que la majeure partie des personnages présents dans ce livre.

    Un ouvrage qui sidère par sa simplicité et son efficacité, sur fond de tragédie familiale, expériences médicales et quête de rédemption. Une Inflammation qui excite les cœurs, les tripes et les âmes, sans que l’on cherche, une fois n’est pas coutume, à en trouver le remède.

    12/03/2018 à 18:20 6

  • Total combat round 1

    Jack Manini

    5/10 Jimmy Pérez combat dans le MMA. Il est amoureux de Jazlyne, la fille de son entraîneur, et vit avec son grand-père depuis le décès de ses parents. Après le combat avec Brent Duty dont il sort victorieux, il est victime d’un malaise. Deux mois dans le coma, méningite bactérienne. Il va devoir réapprendre à utiliser son corps amoindri et vivre sans sa bien-aimée, morte de la même bactérie.
    Une BD plutôt intéressante mais qui se disperse vite, entre combats, liens familiaux, amour perdu, rédemption, combat avec des SDF, etc. Non, vraiment, malgré l’esthétique sympathique, il manque une colonne vertébrale plus solide à ce tome qui se désagrège à mesure que les planches défilent. J’espère que le deuxième et dernier tome sera plus compact autour du coeur de l'intrigue.

    29/01/2023 à 19:18 2

  • Total combat round 2

    Jack Manini

    4/10 Jimmy vient de perdre par abandon face à Mike Seymour, quittant la cage pour venir en aide à son grand-père, et en apprend beaucoup plus qu’il ne l’aurait voulu sur sa famille, découvrant qui est son véritable père ainsi que le fait qu’il est encore en vie. Malgré l’éclairage porté sur la discipline qu’est le MMA, un second tome aussi éparpillé et inintéressant à mes yeux que le premier. Objectivement, sans grand intérêt, l’accumulation d’ingrédients venant tuer le goût du cocktail final.

    29/01/2023 à 20:01 1

  • Des Jours et des nuits à Chartres

    Henning Mankell

    8/10 … ou le destin de la malheureuse Simone (Touseau dans la réalité), coupable d’avoir aimé pendant l’Occupation un soldat allemand (Helmut), ayant eu un enfant de lui, et que l’épuration va malmener lors de ces tristes « réjouissances » cathartiques. Une pièce de théâtre poignante, courte et emplie de tact et d’humanité, avec seulement huit personnages (Simone, son amie Marie, Edith qui a perdu son fils durant le conflit, Dominique et Raphaël qui sont deux résistants, son compagnon Helmut, et Robert Capa dans son propre rôle). L’histoire est née de la célèbre photographie « La Tondue de Chartres » qui a inspiré cette histoire à Henning Mankell et l’a traduite avec ses propres mots, puisqu’il s’y fait « l’interprète d’une image ». Une émouvante lecture, où rien n’est ni blanc ni noir, tout en nuances, refusant de jeter l’opprobre sur les uns ou les autres, même si l’on y devine sans mal à la fois les cicatrices à vif du peuple français tout autant que le désespoir de ces femmes qui ont eu le malheur d’avoir vécu une histoire d’amour avec « un » Allemand. Du vitriol tout de même jeté à la face des « héros » (comme le disait Jean Rochefort avec la classe qu’on lui connaît, « dans ces périodes troubles, les héros naissent comme les champignons après la pluie »), parfois plus revanchards ou ayant des choses à se faire pardonner que de véritables êtres salvateurs. Bref, un saisissant moment de lecture, ici accompagné de quelques textes qui permettent de mieux cerner certaines vérités historiques, le contexte, voire de creuser des thèmes propres à cette pièce.

    10/08/2020 à 23:21 4

  • La Cinquième femme

    Henning Mankell

    8/10 Presque aussi bon que "Le guerrier solitaire". Une intrigue intéressante et de belles densités humaines chez les personnages.

    30/08/2010 à 09:59 2

  • Le Guerrier solitaire

    Henning Mankell

    9/10 Un excellent moment de lecture en ce qui me concerne. Lu il y a bien longtemps, mais j'ai encore en tête le scénario, preuve qu'il m'avait marqué. L'un des meilleurs Mankell à mon goût.

    30/08/2010 à 09:58 1

  • Le Corps noir

    Dominique Manotti

    9/10 Paris, 6 juin 1944. Les Alliés débarquent sur les plages normandes. Il faudra environ deux mois et demi avant la libération de Paris. Entre ces deux moments, la population va hésiter : les Allemands peuvent-ils encore gagner la guerre ? Qui seront les vainqueurs lorsque s'achèveront les batailles ? C'est tout un microcosme parisien qui s'en trouve ainsi ébranlé, en proie au doute. Banquiers, artistes, prostituées, stars du cinéma, policiers... Dans ce tourbillon de passions accentuées par les rancœurs, les rivalités et les volontés de ne pas être du côté des perdants, chacun devra choisir son camp.

    Dominique Manotti, c'est une plume. Sèche, allant à l'essentiel, avec des phrases saccadées, parfois nominales, avec des verbes sans sujet. L'écriture est alerte, sans concession, aussi effrénée que l'époque dépeinte. Durant cette période très équivoque, emplie de cynisme et de calculs immoraux, l'auteur décrit avec une étonnante crédibilité les échanges entre les divers personnages, nombreux et variés. Le fil conducteur du livre : des trafics, des jeux d'influence. Du sang également, beaucoup, versé pour nettoyer les honneurs impurs et tenter de faire bonne figure quand le vent tourne. Dominique Manotti ne se fait pas juge des attitudes des individus qu'elle décrit : elle présente, en toute objectivité, les situations auxquelles ils sont confrontés, les choix dont ils disposent, les décisions qui sont les leurs. A cet égard, il faut mettre en relief son talent pour brosser le tableau d'une époque plus que troublée et donner vie avec simplicité et humilité aux protagonistes, immergés dans un contexte vacillant qui les dépasse, mettant à nu leurs contradictions et leur sens – parfois très approximatif – de la dignité.

    Le corps noir est donc un ouvrage remarquable, au style trépidant et à l'intrigue très originale. Quiconque s'intéressant à la Seconde Guerre mondiale, à la peinture des mœurs ou à l'âme humaine y trouvera de quoi nourrir sa réflexion. Un opus à la croisée des genres, quelque part entre le thriller, la littérature historique et le roman noir, qui se pose également comme un livre émérite sur la Résistance et l'épuration.

    06/06/2010 à 19:57 3