Horatio

294 votes

  • La Maison hantée

    Shirley Jackson

    9/10 Ce roman est étonnant, comme toutes les histoires écrites par Shirley Jackson j'imagine ; Nous avons toujours vécu au château est de la même trempe, bien que très différent. Que se passe-t-il vraiment dans cette maison ? Et dans la tête d'Eléonore ? Car au final ce sont ses pensées qui mettent le plus mal à l'aise. On peut supposer que c'est la maison qui l'appelle et qui attise ses sentiments mais rien n'est sûr, d'autant que les attitudes des autres personnages sont étranges également. A moins que nous ne les voyions que par le prisme d'Eléonore... Bref, si vous êtes le genre de lecteurs à vouloir des réponses et de l’esbroufe vous n'en trouverez pas ici. Shirley Jackson tisse de la dentelle, et c'est justement cette finesse et ce côté éthéré et "sensuel"qui rendent ses récits aussi malsains et dérangeants.

    04/11/2017 à 11:36 8

  • La Mort viendra, petite

    Jim Thompson

    9/10 Thompson met cette fois en scène trois paumés qui vont devoir collaborer pour organiser un kidnapping : un ancien boxeur atteint de troubles psychiatriques, une veuve qui a sombré dans l'alcoolisme et un escroc minable adepte des coups fourrés. On suit l'histoire à travers les yeux du premier, qui menace de plonger dans une fureur sanguinaire à la moindre vexation. Comme toujours dans les romans de cet auteur, le caractère et la psychologie des personnages sont parfaitement rendus, et notamment la montée de la méfiance des uns envers les autres. Mais pour une fois, tout n'y est pas entièrement noir et dévasté, et le final est particulièrement émouvant.

    01/04/2011 à 19:25 3

  • La Reine des pommes

    Chester Himes

    9/10 À Harlem se côtoient pêle-mêle misère et argent (souvent mal gagné), escrocs et gogos, violence et absurdité. Tous les ingrédients qui se retrouvent dans ce polar mené tambour battant, qui peut parfois se révéler difficile à lire. Les personnages sont tous plus loufoques les uns que les autres, que ce soit Jackson, l'imbécile crédule au point de tomber dans toutes les arnaques, son frère Goldy qui se déguise en bonne sœur pour quêter dans le quartier, ou encore Ed Cercueil et Fossoyeur Jones, les deux flics impitoyables qui deviendront les personnages emblématiques de Chester Himes, et qui n'ont ici qu'un rôle secondaire. Bourré d'humour et désespéré à la fois, ce pur roman noir se dévore sans retenue.

    27/03/2011 à 12:35 3

  • Le Chien des Baskerville

    Arthur Conan Doyle

    9/10 Sans doute la plus connue des enquêtes de Sherlock Holmes, et l'une des plus réussies. L'ambiance qui se dégage de la lande désolée et hantée par le chien maléfique joue bien sûr pour beaucoup. Et pour une fois avec un roman de Holmes, il n'y a pas de cassure dans le rythme narratif pour remonter à l'origine de l'affaire.

    07/02/2011 à 11:48 5

  • Le Criminel

    Jim Thompson

    9/10 Roman écrit il y a presque soixante ans, le thème du Criminel est pourtant plus que jamais d'actualité. Un jeune garçon de quinze ans, entendu par la police lors de l'enquête sur le viol et le meurtre d'une de ses voisines, est pris pour cible par la presse : celle-ci, pour augmenter ses tirages, n'hésite pas à le désigner comme coupable. Journalistes, policiers, district attorney, avocat, témoins... Tous ont quelque chose à y gagner et l'utilisent pour servir leurs propres intérêts. Personne ne se préoccupe de la vérité. Thompson nous présente tour à tour l'affaire à travers les yeux du présumé coupable, de ses parents, de son avocat, etc. et nous laisse voir leurs manœuvres pour grappiller de petits avantages de la situation, ainsi que toutes leurs bassesses. Le roman est réglé comme une horloge ; les dialogues sonnent juste, chaque phrase est importante, chaque mot dérange, les sous-entendus sont éloquents. Critique percutante de la justice, de la presse, de la société en général, Le Criminel n'est pas loin du chef-d'œuvre.

    03/04/2011 à 19:38 2

  • Le Dahlia Noir

    James Ellroy

    9/10 Je ne suis pas client de l'explication du meurtre du Dahlia noir donnée par Ellroy, que je trouve un peu tirée par les cheveux ou en tout cas trop téléphonée par rapport au reste du roman. Mais quelle importance, quand tout le reste brille d'une éclatante lumière noire ? Le livre dégage une puissance incroyable, qu'elle provienne des personnages, de l'ambiance ou de l'écriture d'Ellroy. L'un des romans noirs de référence, par un des maîtres du genre.

    17/04/2011 à 09:25 3

  • Le démon dans ma peau

    Jim Thompson

    9/10 Thompson toujours aussi efficace, encore une fois avec un personnage principal froid, violent et calculateur, qui tue sans remords mais sans plaisir particulier non plus. Impressionnant de justesse, surtout quand on repense à l'année de parution du roman.

    20/10/2010 à 18:09 3

  • Le Dernier Arbre

    Tim Gautreaux

    9/10 Ce "Dernier arbre" est un très beau roman qui sait poser les lieux, les personnages, les tensions et les sentiments. Nous sommes ici sur du temps long, avec des bouffées de violence perdues au milieu de la banalité du quotidien : la scierie qui débite sans faiblir les arbres majestueux qui l'entourent, mais aussi les ouvriers qui se battent parfois jusqu'à la mort et qui dépensent le peu qu'ils gagnent en boissons et en prostituées, le tout en pleine période de ségrégation et de prohibition. On meurt pour rien, parce qu'on a triché aux cartes ou qu'on prend une balle qui ne nous était pas destinée, mais la vie n'a de toute façon que peu d'importance ici. Le climat tient aussi une place primordiale, humide et étouffant, et la nature hostile n'est jamais loin, qu'elle prenne la forme de moustiques porteurs de maladies ou d'alligators qui emportent les hommes dans la nuit. Au milieu de tout ça, des hommes, meurtris, frustrés, tourmentés, et aussi quelques femmes qui n'ont rien à leur envier. La comparaison avec Ron Rash a déjà été faite, et je la trouve d'autant plus juste que, comme ce que j'ai lu de Rash, on a assez peu de surprise en lisant ce livre, tout semble normal et si quelque chose arrive, aussi tragique soit-il, c'est que ça devait arriver. L'écriture est belle mais aussi très fluide et surtout elle sait se faire oublier, Gautreaux n'étant jamais dans l'esbroufe. On n'est pas non plus dans un roman écologiste, puisque ce serait complètement anachronique compte tenu du milieu dans lequel se passe le récit (des gens qui partent quand il n'y a plus rien à gagner, en ne laissant que le vide derrière eux, avant d'aller dévaster un autre endroit) et de l'époque (les années 20), mais pourtant, de temps à autre, on voit bien que les personnages principaux sentent dans leurs tripes que ce qu'ils font est injuste et absurde, et qu'ils savent déjà que certains souvenirs les poursuivront à jamais.

    16/04/2021 à 09:40 5

  • Le Lien conjugal

    Jim Thompson

    9/10 S'il est certain que les romans les plus puissants de Thompson sont ceux écrits à la 1ère personne, parce qu'on vit l'histoire dans le cerveau du tueur, Le lien conjugal n'est pourtant pas en reste. Le récit reste classique (des braqueurs de banque en cavale), mais les personnages sont particulièrement complexes et par-dessus tout les liens entre eux se révèlent surprenants : on va ainsi suivre l'évolution des rapports et des sentiments de "Doc" et de sa femme Carol, de la méfiance qui va germer et se développer en eux pour finir par les ronger comme un cancer. Les derniers chapitres sont étonnants de violence psychologique pure, et le roman se termine en apothéose dans un Enfer qui tient plus d'Orwell que de Dante. On est bien loin des deux adaptations ciné sorties sous le titre original de "Guet-apens" (la première avec Steve McQueen et Ali MacGraw, la seconde avec Alec Baldwin et Kim Basinger), sympathiques mais assez éloignées de l'univers de Thompson. Un roman étonnant donc, qui peut constituer une bonne porte d'entrée vers l'œuvre de Big Jim Thompson malgré une traduction d'époque qui mériterait d'être revue.

    15/04/2011 à 09:40

  • Le Nom de la rose

    Umberto Eco

    9/10 Une œuvre débordante d'érudition, qu'il s'agisse d'hérésies, d'ordres religieux, de controverses théologiques, de la vie dans une abbaye... Le style utilisé rend le livre difficile d'accès mais il en vaut largement le détour - même si, contrairement à d'autres lecteurs, je n'ai pas vraiment accroché à l'enquête, mais bien à tout le reste.

    05/09/2012 à 20:24 2

  • Le Petit Bleu de la côte Ouest

    Jean-Patrick Manchette

    9/10 Un polar ciselé à l'extrême, critique sociale autant qu'exercice de style. L'ironie de Manchette surgit à chaque page, impitoyable. Un roman impressionnant.

    29/08/2010 à 19:46 1

  • Le Polar américain, la modernité et le mal (1920-1960)

    Benoît Tadié

    9/10 Un excellent ouvrage consacré aux premières années du roman noir aux États-Unis, bourré d'informations et d'analyses sur ses thèmes et ses pionniers, mais pas bourratif pour autant. Grande Histoire, politique, éléments biographiques sur les grands noms (Hammett, Chandler, Goodis, Thompson...), courants littéraires, psychologie... : l'auteur apporte un maximum d'éléments pour comprendre comment ce genre est né et s'est développé. Le livre est passionnant, c'est clairement un indispensable si on veut en savoir plus sur les origines du roman noir.

    27/08/2019 à 09:11 4

  • Les Aventures de Sherlock Holmes

    Arthur Conan Doyle

    9/10 Douze excellentes nouvelles chargées de mystère. L'écriture de Conan Doyle est précise et rythmée, et les nombreuses touches d'humour qu'il glisse dans chaque enquête sont un régal. L'ensemble est si varié que chacun pourra y trouver son compte : à "Un scandale en Bohème", "La ligue des rouquins" ou "Le ruban moucheté" qui sont les nouvelles favorites des puristes, je leur préfère par exemple "Le mystère du val Boscombe" ou "Les Hêtres-rouges". Bref, un classique indémodable.

    22/01/2011 à 12:56

  • Les Visages écrasés

    Marin Ledun

    9/10 Je partais avec un a priori négatif : le choix du sujet n'était-il pas opportuniste, pour surfer sur les drames qui ont fait la une de l'actualité ? Mais finalement il est traité avec beaucoup de subtilité, au contraire de ce que l'écriture pourrait laisser penser. On sent que l'auteur connaît le phénomène, qu'il s'en inspire et le dénonce mais qu'il ne l'exploite pas. Les mots ont déjà été utilisés par les autres lecteurs : il s'agit d'une descente aux enfers qui prend aux tripes, très éloignée d'une vision simpliste et manichéenne. Je ne trouve pas non plus l'histoire improbable ; après tout, les noms qui reviennent sont peut-être une dizaine, ce qui n'est pas énorme sur une entreprise de 70 salariés environ. Le style quant à lui est rude et saccadé, mais il colle parfaitement au récit et surtout à la personnalité du personnage principal. On ne peut pas dire que c'est une lecture "plaisir", mais c'est à lire - vraiment.

    25/11/2011 à 19:39

  • Lonesome Dove 1

    Larry McMurtry

    9/10 Lonesome Dove, petite bourgade du Texas située à la frontière avec le Mexique, est le point de départ de cette odyssée à travers l'Ouest sauvage. Mais si l'aventure est bel et bien présente (la nature est au moins aussi dangereuse que les bandits ou les indiens), elle rime souvent avec amertume... Les personnages principaux, d'anciens rangers vieillissants, trainent en effet avec eux leurs erreurs passées et les coups durs du destin, impossibles à fuir malgré les années et les kilomètres de piste poussiéreuse. McMurtry prend tout son temps pour lancer son récit, en risquant du même coup de perdre une bonne partie de ses lecteurs, mais une fois que tout s'est mis en mouvement, quand le troupeau prend enfin la route du Montana, les personnages qu'il a décrit avec tant de minutie et de finesse flamboient de vie et d'humanité. On y est, c'est l'Ouest avec tout ce qu'il a de beau et de cruel, les bêtes qu'on tente de rassembler sous l'orage et la pluie battante, les chants qui déchirent les cœurs au crépuscule autour du feu, et la mort, toujours présente, qui peut surgir à n'importe quel moment.

    30/05/2018 à 10:23 8

  • Quand la ville dort

    William R. Burnett

    9/10 Le roman qui a lancé indirectement (par le biais de l'adaptation cinématographique de John Huston) le genre du "film de casse". Cependant, le casse lui-même tout comme sa préparation sont expédiés en quelques pages et l'histoire se concentre uniquement sur les personnalités des protagonistes, leurs fêlures et leurs défauts, qui peuvent faire capoter le plan le mieux conçu. Comme beaucoup de romans noirs de cette époque, le thème de la fatalité est omniprésent et les pages finales sont particulièrement intenses et émouvantes.

    17/02/2013 à 14:25 2

  • Shining, l'enfant lumière

    Stephen King

    9/10 Sans doute mon Stephen King préféré jusqu'à maintenant. L'intrigue est très bien construite, et l'ambiance de l'hôtel Overlook est oppressante à souhait.

    21/04/2014 à 12:33 2

  • Souvenirs de Sherlock Holmes

    Arthur Conan Doyle

    9/10 Des nouvelles de très grande qualité encore une fois, qui associent mystères, déductions stupéfiantes et humour.

    24/01/2011 à 12:16 1

  • Tout le monde sont là !

    Ed McBain

    9/10 Ed McBain s'amuse à nous faire suivre la totalité des inspecteurs du 87ème District sur une seule journée. Cela donne un nombre incroyable de courtes affaires, qui vont de braquages à mains armées à un fantôme voleur, d'une jeune femme disparue à un homme qu'on a roué de coups jusqu'à en briser les deux jambes. Et le tout sans qu'on ne s'y perde un instant grâce à une construction sans faille, sans remplissage, et toujours avec le même souci du détail et la volonté de présenter la vie d'un commissariat au quotidien, à travers les yeux d'inspecteurs aux caractères très différents. Sans doute le roman le plus représentatif de "l'état d'esprit" de la série jusqu'à présent.

    11/06/2011 à 20:31 2

  • Un homme dans la brume

    Dorothy B. Hughes

    9/10 Ce roman est assez incroyable... Il sort en 1947, les techniques de profilage ne sont pas à l'ordre du jour, rien n'est formalisé même si certains enquêteurs ont certainement repéré tout un tas de signes récurrents dans les modes opératoires, les profils, etc., et pourtant le tueur en série décrit par Dorothy Belle Hughes est vraiment crédible, tant au niveau de son comportement que de sa psychologie. Loin d'être un surhomme du mal, c'est monsieur Tout-le-monde : il doute, il s'apitoie sur lui-même, il rêve d'intégrer la haute société, il se sent seul... On le suit dans sa vie de tous les jours, on connaît ses pensées et on devine que ça va mal se terminer, mais quand et de quelle manière ? Le livre se lit tout seul, il est passionnant de bout en bout. Petit bonus : la postface de Megan Abbott, consacrée au "hard-boiled" et à ses personnages, est remarquable.

    20/08/2019 à 17:53 9