Adieu demain

  1. L’œil qui mange

    Vingt années ont passé depuis que l’Éventreur du Yorkshire a été arrêté. Et le sang coule de nouveau. Des victimes, féminines, perforées par des carreaux d’arbalète. Deux flics vont se lancer aux trousses du tueur : Mark Burstyn, superintendant encore tourmenté par sa précédente enquête, et l’inspecteur Clarence Cooper, passionné de plongée sous-marine et expert en infiltration. Cette traque leur coûtera, à tous deux, extrêmement cher.

    Après Sale temps pour le pays, Michaël Mention poursuit sa trilogie anglaise. Rythme enfiévré, termes assassins, jeux avec les mots ainsi qu’avec la construction des phrases : on retrouve immédiatement le style si typique de l’écrivain. Saturé de références musicales, sociales et historiques, le lecteur plonge autant dans cette affaire criminelle que dans l’Angleterre de la fin des années 1960 au début du troisième millénaire. Ce qui frappe également, c’est la profondeur des personnages : depuis Burstyn, obnubilé par une voix enregistrée sur magnétophone et dont il n’a toujours pas découvert l’identité du propriétaire, à Cooper, remarquable caméléon dont l’immersion dans un groupe de parole dédié aux phobies va provoquer la chute morale. Tout y sonne juste et cruel, avec une large part faite à la psychologie de la peur, ou plus exactement, des peurs, tant elles sont nombreuses et protéiformes. Incandescente réflexion sur les anxiétés et la pusillanimité de l’humanité doublée d’une chasse policière de premier ordre, tortueuse, torturée, qui éclaboussera de sa boue méphitique le duo d’enquêteurs.

    On savait Michaël Mention doué, et l’on pouvait attendre avec une certaine appréhension ce nouveau volet, de crainte d’être déçu tant le précédent était réussi. Nous voilà rassurés. Son dernier-né, monstre littéraire aux chélicères inquiétantes et agressives, est certainement à ce jour son ouvrage le plus accompli. Un exceptionnel festin de mots et de maux.

    /5