Chandelles noires

(A Murder of Quality)

  1. Un crime presque ordinaire

    Stella Rode a été assassinée. Épouse d’un professeur de la prestigieuse école Carne, elle a été massacrée à coups de tuyau dans une serre. Pas de témoin, pas de preuve, et pas de mobile. Peu de temps avant son meurtre, la victime avait envoyé à un journal une lettre où elle accusait son mari du pire. L’une des journalistes fait appel à George Smiley, tous les deux s’étant connus pendant la guerre. Pour Smiley, c’est le début d’une investigation qui fourmille de faux-semblants.

    John Le Carré, c’est un écrivain que tout le monde, ou presque, connaît, au moins de nom. L’Espion qui venait du froid, La Taupe, La Maison Russie, La Constance du jardinier, Le Tailleur de Panama : autant de succès critiques et publics qui ont été également portés à l’écran. Et si l’auteur est l’un des plus reconnus dans la littérature d’espionnage, il est aussi très adroit dans le genre du pur policier. Ici, pas d’agents secrets, de complots internationaux ou de combats larvés entre des blocs diplomatiques : on est dans le polar, dans son essence la plus pure. George Smiley, en détective typiquement british, sait mener une enquête et se frotte à bon nombre de suspects : des couples aux puissants appétits professionnels, des querelles de confessions religieuses, des snobismes et des hypocrisies, sans compter une mystérieuse bohémienne qui ne s’exprime qu’en termes alambiqués et métaphoriques. Le roman est court, se lit vite, et la chute, sans effet de mauvais goût ni crépitation artificielle, est à l’image du récit : sobre, intelligente et diablement crédible.

    (Re)découvrir John Le Carré dans le domaine policier est décidément un petit enchantement. Et quand, en outre, on connaît ses terres littéraires de prédilection, on est ravi de passer un si bon moment de lecture en compagnie d’un conteur aux talents si diversifiés.

    /5